http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: Guerre monétaire, maintenant le CHF

vendredi 16 janvier 2015

Guerre monétaire, maintenant le CHF


Quand on observe un sismographe et que brusquement apparaissent des variations brutales sur le graphique, même quelqu’un de non versé dans la science des sismologues comprend bien qu’il se passe quelque chose d’anormal. Alors quand j’ai vu hier le sismographe monétaire s’affoler sur et le franc suisse s’envoler pour provoquer une tempête financière sur les marchés, je me suis dit « que se passe-t-il encore ? » Du jamais vu. Ce jeudi 15 janvier, le franc suisse a bondi de plus de 25% en l'espace de quelques instants, passant de 1,20 franc suisse pour un euro à 0,85 avant de remonter au-dessus de 1 franc suisse pour un euro. Jamais une telle baisse n'avait été observée en seulement quelques minutes sur une des principales devises internationales, c'est historique une fois de plus. Il se passe beaucoup de choses historiques en quelques jours ces temps-ci. Après la dégringolade du rouble russe, voilà l’envolée du franc suisse. La bataille monétaire continue de plus belle. Si dans le climat actuel on se prend dans la figure une crise économique et financière majeure, bonjour l’ambiance.

Qu'est-ce qui a poussé la BNS à jeter l'éponge? Alexandre Baradez rappelle que pour défendre ce taux plancher l'institution helvétique est obligée d'acheter des devises étrangères sur le marché "ce qui lui coûtait cher". Or, "le risque est que la BNS se retrouve en première ligne au moment où la Banque centrale européenne lancera son Quantitative easing (QE)", explique-t-il. Le QE de la Banque centrale européenne (BCE) consiste en des rachats massifs de dette, qui, une fois entrepris, auraient pour effet d'injecter des quantités massives d'euros sur le marché.

La Suisse est en pleine tempête. La Banque Nationale Suisse (BNS) a pris les marchés par surprise en annonçant jeudi 15 janvier l'abandon du taux plancher, déclenchant une montée en flèche du franc suisse qui se retrouve à parité avec l’euro et dans la foulée un "tsunami financier". Les grandes entreprises suisses ont subi en Bourse le choc de la décision de la banque centrale. L'indice SMI, qui a perdu jusqu'à plus de 13 % dans la journée, a fini sur un recul de 8,89 %. Dans la mesure où les exportations représentent 12 % du PIB suisse, l'impact de la mesure peut être important, surtout pour les branches les plus actives à l'export comme l'horlogerie, l'industrie pharmaceutique ou la mécanique de précision, sans compter le tourisme qui représente 3% du PIB, mais avec de grandes disparités comme 25% dans le Valais.

Le bilan de la BNS a tellement gonflé que la situation en devient catastrophique. Les réserves en devises sont passées de 100 milliards de francs environ en 2010 à quelque 500 milliards récemment, soit 70% du produit intérieur brut (PIB) de la Suisse. 400 milliards de réserves sont placées sur l’euro le dollar et le yen. Si le taux se maintient durablement à ce niveau ou pire évolue encore vers une augmentation du franc, la dévaluation de 20% des principales devises détenues par rapport au franc suisse fait tomber le montant des capitaux propres de la BNS à zéro et même moins. Les pertes peuvent être compensées en partie par les réserves prises sur les bénéfices des années précédentes, mais cela aura forcément des conséquences lourdes sur l’économie suisse. Pour mémoire, les cantons sont actionnaires à hauteur environ de 40% de la Banque Nationale Suisse. Les banques cantonales, 24 au total, en détiennent de leur côté plus de 10% du capital. Au final, cantons et banques cantonales sont les actionnaires majoritaires et devront assumer ce rôle dans le positif, comme dans le négatif.  En attendant, suivons les mouvements du sismographe.

Emprunts toxiques et effet domino

Conséquences colossales - « Le franc suisse est sous côté d’au moins 7 % », expliquait au Club finances, fin novembre 2014, l’avocat Marc Le Son. « Quand la BNS ne pourra plus contenir sa parité monétaire ou lorsque le coût consacré par la Suisse à la tenue de cette parité deviendra trop lourd, la monnaie suisse sera valorisée de manière importante, de l’ordre de 25 %, ce qui entrainera une forte progression des taux des contrats toxiques indexés sur le cours euro/franc suisse », ajoutait-il.

Ce scénario vient donc de se réaliser avec des conséquences colossales pour les collectivités locales détentrices d’emprunts toxiques indexés sur les parités entre ces monnaies. « Non seulement les taux de tous les emprunts indexés sur les cours de change euro/franc suisse et US dollar/franc suisse vont fortement augmenter, mais également ceux indexés sur la différence entre la parité euro/US dollar et US dollar/franc suisse », prévient Emmanuel Fruchard qui a déjà procédé à des estimations.

L'affaire des "emprunts toxiques" concerne quelque 1.500 collectivités ou organismes publics en France et a généré au moins 300 contentieux. Ces prêts étaient basés sur des produits financiers très sophistiqués, dont les taux d'intérêt peuvent flamber et étouffer les finances publiques locales.

Les taux d’intérêts explosent - Le taux d’intérêt d’un contrat de la communauté d’agglomération de Chartres métropole passe de 21,9 % avec un franc suisse à 1,2 euro à 44,20 % avec un franc suisse à 1 euro, quand celui de la ville de Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) bondit de 16,50 % à 28,79 % et celui du Syndicat intercommunal pour la destruction des résidus urbains (SIDRU), basé à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) explose littéralement de 38,31 % à 65,61 %.

Christophe Greffet, président de l’association Acteurs publics contre les emprunts toxiques (APCET) et vice-président (PS) du département de l’Ain, a déjà fait ses calculs. Avec une dette toxique de 42 millions d’euros indexée sur la parité euro/franc suisse et la différence entre la parité euro/US dollar et US dollar/franc suisse, le surcoût s’élève à 3,8 millions d’euros. Pour un seul prêt d’un montant de 9,8 millions, le taux évolue de 8 % à 30 %, soit 2 millions d’euros d’intérêts par an.

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