http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: L'âge de l'Eglise de Pergame 5

jeudi 12 décembre 2013

L'âge de l'Eglise de Pergame 5

De l’Église à la basilique (l’église).

On l’a vu, de facto, Constantin était devenu le chef de l’Église sous une forme de césaropapisme quasi sacralisé comme oint de Dieu après la bataille du Pont Milvius. Il n’imposera pas seulement sa direction politique à l’Église, mais également sa vision religieuse en faisant construire des basiliques, les maisons de l'empereur dédiées au Christ et qui vont se multiplient dans tout l'Empire. Constantin contribuera alors au mélange des genres, en mêlant autorité terrestre et spirituelle et la gloire du Christ avec celle de l’empereur, son oint sur terre.

Habilement il saura à la fois flatter l’orgueil et la vanité des évêques en commençant par celui de Rome, qu’il installera dans un palais à côté de la basilique qu’il y édifiera au Latran.  Le palais est la domus Faustae, du nom de Fausta, seconde épouse de Constantin et sœur de Maxence, mais c’est également une manière habile d’épouser politiquement l’Eglise par la voie de l’évêque de Rome. La basilique de la domus Faustae s’agrandira pour finalement devenir la cathédrale de Rome, le siège des futurs papes de l'Église catholique romaine. Le fait de donner le palais de son épouse à l’évêque de Rome, démontre l’extrême habilité de l’empereur dans la manipulation du clergé romain au travers de son évêque, qui acceptera ce que Jésus refusa du diable pendant sa tentation, soit la gloire, la puissance et la richesse. Ce palais restera jusqu’ au XIVe siècle, la résidence principale des papes et la basilique sera le premier édifice religieux chrétien construit en Occident. Elle est considérée comme la « mère » en ancienneté et dignité de toutes les églises de Rome et du monde. Pendant plus de dix siècles, les papes (évêques de Rome) y célébrèrent les offices religieux principaux, et résidèrent dans le palais du Latran voisin. Dans ses murs se réunirent plus de 250 conciles, dont les cinq conciles œcuméniques du Latran.

Outre l’évident aspect politique de l’attribution du palais de l’épouse de l’empereur à l’évêque, la construction de la basilique s’inscrit dans le même ordre d’idée. Tout en faignant faire œuvre utile en soutenant le christianisme, il l’utilisa comme une nouvelle composante de sa stratégie de suprématie. L’empereur ne va pas seulement construire une basilique, mais un superbe édifice dédié premièrement à sa gloire, car le nom même renvoie directement à sa personne. Son orientation particulière dans un axe est-ouest, absorbe sans le nommer l’ancien culte solaire de sol invictus mis en place par Aurélien et qui avait pour but à la fois d’unifier les croyances dans un dieu supérieur, tout en déifiant l’empereur qui en est le représentant sur terre.

Le choix du jour du culte va dans le même sens et reste symptomatique des croyances de Constantin, tout d'abord adepte du culte de Sol Invictus, il diffuse par la numismatique la religion solaire et ses soldats doivent réciter le « jour de la lumière et du soleil » (c'est-à-dire le dimanche), une prière au dieu qui donne la victoire ; ce jour étant aussi un jour de repos, il remplacera le shabbat initial des apôtres. A la célébration religieuse dominicale, on associera la grande fête annuelle du « Soleil Invaincu » qui avait lieu le 25 décembre, soit la date du solstice d'hiver selon le calendrier julien. Ce jour était célébré tous les ans par des jeux du cirque : c'était le Dies Natalis Solis Invicti, « Jour de naissance du Soleil Invaincu » et deviendra en y associant le culte de Mithra célébré dans les armées, le Noël catholique. Sol était devenu la divinité protectrice des empereurs, car de même que le soleil règle le cycle naturel et domine les autres astres, l'empereur gouverne les hommes comme investi d'un pouvoir divin. Avec Constantin l’idée générale sera reprise, mais réadaptée à une sauce chrétienne qui mélangera par syncrétisme tous les cultes avec l’absolution de l’évêque de Rome qui feindra de ne voir là qu’une victoire du Christ, lumière du monde et soleil de justice, sur le paganisme, alors que c’est exactement l’inverse qui s’opéra.

Outre un syncrétisme qui absorbe doucement le culte solaire et celui de l’empereur dans ce christianisme remanié par Constantin, il contribuera également à établir un culte aux saints et reliques en construisant d’autres basiliques à Rome. Selon la tradition, la basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem a été consacrée comme maison des reliques de la Passion ramenées de Terre Sainte par « sainte Hélène de Constantinople », mère de l'empereur Constantin. À cette époque, le sol de la basilique était couvert de terre venant de Jérusalem, acquérant ainsi le titre en Hierusalem. L'église était construite autour d'une pièce du palais impérial d'Hélène, le palais du Sessorium, qu'elle avait transformée d’abord en chapelle vers l'an 320. Quelques décennies plus tard, la chapelle est transformée en une véritable basilique, appelée Heleniana ou Sessoriana. Hélène qui avait suivi la foi de son fils, organisa la première restauration des lieux saints chrétiens de Jérusalem quand elle se rendit dans la ville en 325, afin d'y retrouver des reliques de la passion du Christ. Cela donnera une impulsion importante aux pèlerinages en Terre Sainte. La découverte la plus importante d'Hélène sera l'Invention de la Vraie Croix, sur le site du Saint-Sépulcre où l'empereur Hadrien avait fait construire un temple à Vénus et qu'Hélène fit abattre. Furent aussi retrouvés (d'après la tradition) les clous de la crucifixion. Hélène fit notamment transporter à Rome en 326 le Saint-Escalier, puis elle quittera Jérusalem en 327. Canonisée, elle est considérée aujourd’hui comme sainte par les Eglises catholique et orthodoxe, sa fête est fixée au 18 août pour les catholiques et au 21 mai pour les orthodoxes, qui fêtent le même jour Hélène et Constantin ("Fête des très Grands Souverains Constantin et Hélène, égaux aux apôtres"). Concernant les reliques de la croix ou des clous, il convient de remettre cela dans le contexte du judaïsme de l’époque de Jésus où ces objets étaient considérés selon la Loi mosaïque comme impurs et liés à une malédiction comme le rappelle Paul aux Galates 3 : 13 Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous (car il est écrit, Maudit est quiconque est pendu au bois). Donc en aucun cas ces objets auraient été conservés par des juifs et encore moins regardés comme saint. Tout ceci tient du paganisme et n’est rien de moins qu’un mensonge entretenu par l’empereur et plus tard par les papes catholiques qui hériteront à la fois de son titre et de son esprit.

Vers 327, Constantin inaugura également la première basilique du Vatican, construite sur un cimetière chrétien des Ier et IIe siècles où plusieurs évêques avaient été inhumés (mais pas l’apôtre Pierre, contrairement à la légende). Constantin construisit également une basilique sur la tombe de l’apôtre Paul, à environ 2 km de la muraille aurélienne qui ceinturait Rome. Cet édifice est consacré le 18 novembre 324 par l’évêque Sylvestre. Ainsi trois des premières basiliques construites sous Constantin, deviendront des basiliques majeures de Rome. Cependant, l'empereur qui était aussi pontife suprême de la religion païenne, ne détruira pas les temples païens. En 325, durant le Concile de Nicée, l'évêque Macaire demanda à l'empereur Constantin de détruire les temples païens construits uniquement sur les lieux saints chrétiens dans la ville de Jérusalem. C’est ce qui sera fait sur le lieu supposé du sépulcre du Christ sous la conduite d’Hélène sa mère.

En 324, Il décida que Byzance était parfaite pour y installer la nouvelle capitale de l’Empire. Elle fut surnommée la «Nouvelle Rome» et rebaptisée Constantinople en son hommage. C'est en l'année 325, la vingtième de son règne, qu’il fit élever la première basilique, consacrée non pas comme on le croit parfois à une sainte du nom de Sophie, mais à la Sagesse Divine (en grec : Haghia Sophia), sur un emplacement où, du temps où la ville grecque s'appelait encore Byzance, s'élevaient des temples païens. Constantin n'avait pas prévu d'église pour sa capitale, ce qui est pour le moins curieux pour un empereur prétendu si chrétien. L'église des Saints-Apôtres, dont il édifia la première construction, était destinée à l'origine à devenir son mausolée et ce n'est qu'avec l'arrivée en 356 ou 357 des reliques des saints André, Timothée et Luc, qu'elle fut consacrée aux Apôtres. Constantinople témoigne donc comme une preuve à charge, que l’empereur Constantin n’était tout simplement pas un chrétien au sens biblique du terme, mais un simple manipulateur politique de la religion romaine comme le furent ses prédécesseurs.

Grâce à Constantin et à l’évêque de Rome qui était devenu son complice, le diable avait désormais à sa disposition des édifices cultuels chrétiens dédiés à l’empereur sous le terme de basilique, orienté dans l’axe solaire pour perpétuer le culte solaire et pouvant également développer un culte aux saints et aux reliques à la manière antique. La doctrine de Balaam va devenir celle de l’évêque de Rome qui va la diffuser dans tout l’Empire.

Le culte des saints et des reliques.


Le culte des saints et des reliques n’était pas directement le fait de Constantin, cela existait déjà au paravent, mais d’une manière plus discrète et locale. Ces cultes furent le prolongement d’une pratique qui est née assez tôt avec le martyr des apôtres et sera développée pendant le temps des persécutions. Quand dans l’Église persécutée un membre éminent ou aimé était mort en martyr, on récupérait le corps discrètement et on l’enterrait près ou directement de l’endroit où s’effectuait le culte clandestinement. En agissant ainsi on ne rendait pas directement un culte aux morts, mais on les honorait tout en gardant et chérissant le souvenir de ceux que l’on avait tant aimés. On peut facilement comprendre cela quand on perd un être cher. Mais la chose va dangereusement dériver au fil du temps. Ainsi, quand les premiers édifices d’ampleur vont être construits, les restes des « saints » y seront intégrés de manière systématique. Comme on pense d'une part que le corps des martyrs a été habité par le Saint Esprit, et d'autre part qu'il est appelé à ressusciter corporellement au Jour du Jugement dernier, on considère qu'il est profitable de prier, puis de se faire enterrer à proximité de ces corps privilégiés pour tirer parti de la communion des saints.

À partir du IVe siècle, des martyria construits en dehors des villes puis dans les centres urbains abritent des reliquaires ou des monuments dédiés, les memoriae funéraires, nécessaires suite à la translation et la division des reliques, car le nombre des martyrs diminuait après la conversion de Constantin et la christianisation de l'Empire. C’est sur ces martyria qu’on construira les futures églises. Le troisième Concile de Carthage en 397 ira plus loin en autorisant la coutume de construire des autels sur les corps des martyrs, ou d'enclore la place où ils avaient souffert. Le troisième concile de Constantinople ordonne de démolir tous les autels qui n'ont pas été édifiés sur ces tombes. Face à la multiplication sauvage d'autels, le quatrième Concile de Carthage en 401 prend une position inverse, car on déterrait les restes des martyrs pour en faire des reliques sur lesquels étaient construits ces autels. La dérive on le voit, s’accélère de plus en plus pour s’éloigner totalement des pratiques apostoliques des origines. La séparation d’avec le judaïsme, a permis de considérer ce qui était comme impur avant (le corps d’un mort), comme une chose sainte (les ossements d’un mort). Toutes ces pratiques tournent résolument le dos à tout ce qu’enseigne la Bible et n’ont absolument rien de chrétien dans son fond. Associés à la mode des processions qui sont des pratiques païennes courantes, la religion chrétienne va de plus en plus s’éloigner de ce qui fut sa forme première.

Martyrium de l'église Saint-Étienne-le-Rond à Rome
À partir du Ve siècle en Afrique du Nord et du VIe siècle en Gaule, on produira de petits reliquaires sarcophages accessibles qui sont placés dans ou sous l'autel. Puis les reliquaires sont scellés dans une niche (le loculus) à l'intérieur même de l'autel. La châsse hermétique et scellée, n'est ouverte qu'en de très rares occasions en présence d'un évêque, de sorte que la présence invisible du saint reste quelque peu abstraite et impalpable (de nos jours, elles sont parfaitement visibles à travers le reliquaire et exposées dans les églises catholiques). Le culte des saints succède alors au culte des martyrs au Moyen Âge. Le deuxième concile de Nicée en 787 affirme la nécessité de vénérer les images et les reliques. Puisqu'il fallait donner la preuve que l'église possédait réellement ces objets de vénération, dès le haut Moyen Âge on a trace de processions, lors desquelles la présence des reliques et leur fonction protectrice de la communauté étaient ritualisées. Arrivé à ce stade, l’Eglise ne représente plus le corps du Christ, mais  a rejoint dans ses fondements ce qui fit le paganisme antique et qui est appelé Babylone dans l’Apocalypse.

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