http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: L'âge de l'Eglise d'Ephèse 1

jeudi 21 novembre 2013

L'âge de l'Eglise d'Ephèse 1

Apocalypse 2 : 1 Ecris à l’ange de l’Église d’Ephèse: Voici ce que dit celui qui tient les sept étoiles dans sa main droite, celui qui marche au milieu des sept chandeliers d’or: 2  Je connais tes œuvres, ton travail, et ta persévérance. Je sais que tu ne peux supporter les méchants ; que tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et qui ne le sont pas, et que tu les as trouvés menteurs ; 3  que tu as de la persévérance, que tu as souffert à cause de mon nom, et que tu ne t’es point lassé. 4,  Mais ce que j’ai contre toi, c’est que tu as abandonné ton premier amour. 5  Souviens-toi donc d’où tu es tombé, repens-toi, et pratique tes premières œuvres ; sinon, je viendrai à toi, et j’ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes. 6  Tu as pourtant ceci, c’est que tu hais les œuvres des Nicolaïtes, œuvres que je hais aussi. 7  Que celui qui a des oreilles entende ce que l’Esprit dit aux Églises : A celui qui vaincra je donnerai à manger de l’arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu.

Il y a un ange pour chaque Église et qui est un “messager”. Et il y avait sept anges pour les sept Églises, c’est-à-dire sept messagers. Ils étaient des étoiles dans Sa main. Et dans Sa main, ces sept étoiles devaient briller dans les jours de ténèbres dans lesquels nous vivons. L’ange de la première Église fut l’apôtre Paul, son fondateur comme apôtre pour les nations, le messager de Dieu. C’est lui qui apportera la lumière du Christ aux nations.

Le premier âge de l’Église fut celui de l’Église d’Ephèse. Il a commencé avec les apôtres en 33 à Jérusalem le jour de la Pentecôte. Paul comme fondateur de l’Église d’Ephèse et apôtre pour les nations, en sera le messager emblématique du premier âge, qui durera jusqu’à la mort de Polycarpe disciple de l’apôtre Jean. Lors de son second voyage missionnaire en 50,  Paul établit l’Église d’Ephèse. En l’an 53, Paul revient à Ephèse pour un séjour de trois ans. Ce que l'on appelle son «troisième voyage missionnaire» est, pour l'essentiel, un long séjour dans cette ville, où il écrira une partie de ses épîtres. Selon son habitude, Paul prêche d’abord dans la synagogue mais sans grand succès. Les juifs l'écoutent pendant un certain temps, mais après trois mois, ils ne le supportent plus. C’est le désaccord total. (Actes 19, 9) Paul rompt alors avec eux et quitte la synagogue.

Ces trois années à Ephèse seront semées d'espoirs, de réussites mais aussi de combats et d'échecs. Nulle part, au cours de son apostolat, Paul n'aura séjourné aussi longtemps à un même endroit et soutenu des efforts aussi éprouvants. Il travaillait souvent, a-t-il confié, «dans les larmes et au milieu des épreuves».

Que Paul ait choisi Ephèse comme centre de ses activités missionnaires n’est pas étonnant. On constate que la ville se trouve à égale distance de la Galatie et de Thessalonique (500 kilomètres) ; elle est à 400 kilomètres de Corinthe, à 445 de Philippes, à 330 d'Antioche de Pisidie. A partir d’Ephèse, on pouvait, sans trop de difficultés, expédier et recevoir des messages de toutes les Églises. Pendant son second voyage missionnaire, Paul passe par Lystre et prend Timothée comme compagnon et collaborateur. Timothée est l’homme de confiance de Paul en qui il voit un fils spirituel. Il l’établira responsable de l’Eglise d’Ephèse. Timothée y préside, comme délégué apostolique, au gouvernement de l'Église de cette grande cité. Il a reçu de Paul, partant pour la Macédoine, l'ordre de rester à son poste, afin de s'opposer à la propagation de certaines doctrines qui jettent le trouble dans les esprits (1Ti 1:3;voir l'épître en entier). C'est encore à Ephèse, selon toute probabilité, qu'il recevra la nouvelle lettre où son maître, de nouveau prisonnier à Rome, l'appellera instamment auprès de lui (2Ti 4:9,21).

Plus tard il est dit que l’apôtre Jean devint le pasteur de cette Église et qu’il en eut la charge jusqu’à sa mort. Ephèse est donc une ville particulière dans le sens où elle a accueilli dès sa fondation des piliers du christianisme naissant. Dans son symbole on peut considérer que la ville représente le monde païen dans son ensemble et l’Eglise d’Ephèse celle des apôtres telle qu’elle fut dans les premiers temps.

Ap 2 : 1 Ecris à l’ange de l’Église d’Ephèse: Voici ce que dit celui qui tient les sept étoiles dans sa main droite, celui qui marche au milieu des sept chandeliers d’or

Au milieu des sept chandeliers d’or marche Jésus-Christ le Dieu Tout-Puissant. Que fait-Il? Il n’a pas dit qu’Il marchait avec un seul chandelier, Il marche au milieu de tous. Qu’est-ce que cela montre? Qu’Il est le même Dieu hier, aujourd’hui et éternellement et dans chaque âge d’Église, pour chaque croyant. Il vient avec le Saint-Esprit pour chaque âge et pour chaque personne; Il est le même hier, aujourd’hui et éternellement. Tel un axe central au milieu de la roue du temps formée par les 7 chandeliers, Dieu initie une dynamique nouvelle dirigée vers les nations. Un temps nouveau s’amorce, qui va durer 2000 ans. Notez le mouvement, Dieu marche et ne reste pas statique. Cela signifie que si une Église devait s’arrêter dans son cheminement avec le Christ, immanquablement elle s’éloignerait de Dieu, ce qui conduirait fatalement à son déclin et à la fin de l’âge de cette Église. 

« Tenant dans sa main droite… » Main droite signifie autorité et puissance. Tenant dans Sa main droite, conduisant sous Sa direction les sept messagers des sept âges de l’Église. Nous pouvons voir Christ S’avancer au travers de cet âge de l’Église, Se faisant connaître à Son peuple jusqu’au travers de l’âge des ténèbres, au travers de chaque âge; tandis que l’Église devenait formaliste et qu’elle s’éloignait peu à peu, les uns allant d’un côté et les autres de l’autre, une petite minorité de l’Église tiendra toujours ferme, et Christ travaillait avec elle, confirmant Sa Parole; Il la conduit au travers de tout cela.

L’Église commence le jour de Pentecôte à Jérusalem exclusivement avec des juifs. Puis, à cause de l’endurcissement de leurs cœurs, le Seigneur va se tourner vers les nations. Un nouveau cycle va alors commencer, comme un cycle lunaire. D’une pleine illumination, lentement la lune va perdre de son éclat quand l’ombre terrestre l’obscurcira, jusqu’à être totalement dans les ténèbres au Moyen Âge. Puis au travers de différents mouvements de réveils, la lumière réapparaîtra progressivement pour revenir à une lune pleine à Jérusalem, au milieu du peuple Juif revenu sur sa terre. Et comme les choses commencèrent petitement, elles finiront de même. Matthieu 24 : 21,  Car alors, la détresse sera si grande qu’il n’y en a point eu de pareille depuis le commencement du monde jusqu’à présent, et qu’il n’y en aura jamais. 22  Et, si ces jours n’étaient abrégés, personne ne serait sauvé ; mais, à cause des élus, ces jours seront abrégés. Au fur et à mesure que la lumière disparaîtra au sein des nations pour ne rester que sur un reste fidèle, la nation juive par grâce, résistera aux ténèbres et se sera la fin. Ainsi, dans le monde seul un petit reste à proportion de l’humanité sera gardé dans la main de l’Eternel et préservé. 

« Ecris à l’ange de l’Église d’Ephèse: » Quelques données historiques sur la ville nous expliquent pourquoi Ephèse fut choisie comme symbole du premier âge. En ce temps-là, Ephèse était la capitale de la région " aux 500 villes " que les Romains appelaient la province d'Asie. Ephèse revient donc à poser le fondement (comme capitale ou direction) de ce que sera l’Église et son opposition dans les siècles à venir. Les grandes lignes de la marche de l’Église y sont tracées, ainsi que celles de la marche du monde autour d’Elle.


Ephèse fut un port célèbre qui abritait l'une des 7 merveilles du monde antique, le Temple de Diane, construit avec une richesse flamboyante. Il abritait l'image de Diane, (déesse de la fertilité que les Grecs adoraient autrefois sous le nom d'Artémis). Selon les Éphésiens, cette image serait descendue du ciel (Actes 19:35). Un fort foyer de sorcellerie habitait cette ville. Paul y travailla pendant 3 ans avec un immense succès : il y fonda l'une des communautés les plus solides du christianisme primitif. Tous les chrétiens convertis brûlèrent leurs livres de sorcellerie en place publique (Actes 19:19) d'une valeur de 50 000 drachmes. Sachant qu'une bonne journée de salaire était payée un drachme, imaginons le parallèle financier à notre époque. La ville vivait richement du commerce du culte païen de Diane. La prédication de Paul vint troubler ce marché fructueux au point que les marchands de la ville provoquèrent une émeute contre Paul (Actes 19:24). Timothée et Jean continuèrent l'œuvre de Paul dans cette ville et le culte de Diane commença à diminuer. En 262, les Goths détruisirent définitivement le Temple de la déesse.

Très près de la côte se trouve le bois d'Ortygie traversé par le ruisseau de Cenchrius, c'est là qu'on situe le lieu de naissance d'Apollon et d'Artémis. La ville est célèbre pour son Temple d'Artémis (L'Artémision, terminé vers 550 av.J.C), l'une des sept merveilles du monde antique. Artémis était la Déesse tutélaire de la cité. Selon Hérodote (Historien Grec, v.484-425), la création d'Ephèse est due à Androclos (ou Androklos), un des nombreux fils du 17e et dernier Roi d'Athènes, Codros (ou Kodros), qui aurait amené les colons Ioniens au XIe siècle. La légende raconte qu'il a fondé la ville, sur le lieu où l'oracle de Delphes, est devenu réalité. Au début la ville occupe les hauteurs (Paroreia) ou s'établissent des Ioniens après avoir chassé les Lélèges et les Cariens (Premiers occupants). Les Lydiens habitent la ville basse ou se trouve le grand Temple d'Artémis. Les autochtones étant dévoués au culte de la Déesse Cybèle (ou Kybele). Afin de se concilier ces populations, les Grecs vont fusionner le culte d’Artémis et de Cybèle, cette nouvelle Déesse est identifiée comme Artémis d'Ephèse.

A l'époque romaine, la ville était essentiellement une ville religieuse, où l'on n'adorait pas seulement la Grande Artémis, mais où se vendaient force amulettes, statues sacrées et combinaisons de lettres magiques. Au culte d'Artémis fut associé progressivement celui de l'empereur. Des inscriptions et des médailles nous révèlent que la ville s'enorgueillissait d'être la gardienne du temple d'Artémis et des empereurs. L'histoire nous apprend que Domitien exigeait là une soumission au culte impérial avec plus de rigueur qu'ailleurs. Outre le temple de Diane/Artémis, le temple de Domitien fut l'un des plus grands temples de la ville. Au cours de son histoire, Ephèse va obtenir quatre fois le privilège de pouvoir consacrer un temple à un Empereur et d'en assurer la garde et l'entretien. Domitien (81-96) fut le premier Empereur qui accordera le droit aux habitants d'Ephèse de construire un temple. Pour le remercier, ces derniers élèveront une statue de l'Empereur de 7 m. de hauteur. Domitien symbolise l’autorité du pontife romain, ainsi que la persécution contre les chrétiens. C’est sous son règne qu’on exilera l’apôtre Jean à Patmos.

L'Artémision était le temple le plus fréquenté d’Asie. Il avait quatre fois la surface du Parthénon. Il alignait  cent vingt-sept colonnes ioniques sur 190 mètres de longueur et 55 mètres de largeur. Au 6e siècle av. J.-C., il a fallu la fortune de Crésus, roi de Lydie, pour achever la construction du prodigieux ensemble. Face à une telle réussite, l'Antiquité a placé l'Artémision parmi les Sept Merveilles du monde. Le cœur de la visite du temple était naturellement la statue de la déesse. En la voyant, les visiteurs s’exclamaient : «Grande est l’Artémis d'Ephèse !» L'énorme statue de marbre, haute de trois mètres, nous a été conservée, et on peut l’étudier en visitant le musée d'Ephèse. Ce n'est pas tant la dimension qui frappe que l'incroyable surcharge de symboles divers qui parsèment la statue de la déesse. C’est un véritable livre ouvert sur le culte des déesses mères, qui par syncrétisme ont façonné cette statue.

On a établi un rapport étroit entre l’Artémis vénérée à Ephèse et les grandes déesses d’autres peuples : on pense d’ailleurs qu’elles ont une origine commune. Un dictionnaire biblique déclare ce qui suit : “ Artémis présente de si étroites analogies avec Cybèle la déesse phrygienne, et avec d’autres représentations féminines de la puissance divine dans les pays d’Asie, telles que Ma de Cappadoce, Astarté ou Ashtaroth de Phénicie, Atargatis et Mylitta de Syrie, qu’on peut penser que toutes ces divinités ne sont que les variantes d’un seul et même concept religieux, qui présente quelques différences selon les pays, différences qui s’expliquent du fait que ce concept a évolué en fonction des circonstances locales et de la mentalité du pays. ” — A Dictionary of the Bible, par J. Hastings, 1904, vol. I, p. 605. C'est que le culte d'Artémis, introduit par les Grecs qui peuplèrent une partie de la côte au début du premier millénaire av. J.-C., s'est fortement transformé au contact des divinités autochtones auxquelles il s'est substitué. Faire l'unité de tous ces cultes, reflets de la multiplicité des traditions religieuses et des différences ethniques en Asie Mineure ne fut sans doute pas chose aisée. La construction de l'Artémision, et surtout celle du temple archaïque dit "de Crésus", correspond à une volonté politique de les réunir en un seul lieu.

La Diane/Artémis d’Ephèse

Artémis est identifiée à la Lune à l'opposé de son frère jumeau Apollon qui est le dieu du Soleil. Tous deux s'opposent et se complètent. Comme Apollon, Artémis est porteuse de lumière. On la nomme à ce titre « Phosphoros ». Apollon personnifie le Soleil et la clarté du jour, Artémis éclaire la nuit et brandit une torche, symbole du luminaire de la nuit. Artémis est l'une des trois déesses vierges du mont Olympe. Les deux autres étant Athéna et Hestia. Elle a fait le souhait de rester vierge et chaste toute son existence, comme une Nymphe. Elle punissait même les hommes qui tentaient de la séduire ou qui lui tenaient des propos irrespectueux. Un jour en effet, elle fut surprise dans son bain par Actéon, elle décida de le transformer en cerf en toute audace. Cependant la Diane/Artémis d’Ephèse n’avait pas encore ce statut de vierge, car elle s’identifiait encore aux cultes plus anciens des déesses mésopotamiennes. C’est son évolution vers Diane chez les Romains qui la confirmera comme déesse vierge.


La Grande Déesse était souvent représentée sous l'aspect d'un "xoanon", c'est à dire d'une statue taillée dans un tronc d'arbre. Et on suppose justement que la plus ancienne des statues d'Artémis se trouvant à Ephèse était un "xoanon" grossièrement taillé dans le bois. L'Artémis éphésienne conserva toujours cette caractéristique "xoanienne". La statue que vit Xénophon était bien en bois et, au Ie siècle ap. J.-C., Pline l'Ancien indique clairement que la statue celle qui figurait dans le temple était sculptée dans du "cyprès". Par la suite, on éleva des répliques en terre cuite, en  pierre ou en bronze, mais ces reproductions garderont toujours l'esprit de leur matière d'origine.

Ce qui évolua, au cours des siècles,  c'est l'ornementation.  Xénophon nous dit qu'au IVe siècle, la statue était déjà  recouverte de feuilles d'or. Il fallut aussi intégrer, sur cette forme stylisée,  de nombreux attributs de la déesse. C'est pourquoi le type classique de l'Ephésia frappe d'abord par la multiplication des symboles. La disposition verticale, des pieds racines à la tête mât ou feuillage, le rangement, voire le classement des attributs animaliers dans les cases d'un quadrillage, les protubérances portées en pendentifs, tout montre un souci d'organisation et une volonté de rassembler sur la même statue le plus grand nombre possible d'attributs.

Artémis xoanon est dépourvu de membres inférieurs, engoncée de la taille aux pieds dans un fourreau qui descend jusqu'au sol, comme si elle y était plantée. On voit nettement, sur certaines statues ou statuettes, des ramifications qui semblent s'enfoncer dans la terre. Le "xoanon" n'est donc pas seulement une statue faite en bois. C'est une divinité arbre, dont il faut imaginer que les racines s'enfoncent dans la Terre mère, en souvenir de l'idole originelle qui fut placée dans le sanctuaire dit "de l'arbre", premier téménos à ciel ouvert installé dans le marécage du Caystre.

Le bas du corps est constitué d'une sorte de socle, généralement cylindrique. Il apparaît le plus souvent quadrillé, chaque case contenant un ou plusieurs animaux de toutes espèces : cerfs, sangliers, fauves, abeilles, chèvres, taureaux, chevaux, griffons. En général, les mêmes animaux se retrouvent dans des cases contiguës sur la même ligne. On retrouve là les attributs grecs traditionnels de la πότνια θηρῶν (souveraine des bêtes sauvages) et on peut penser qu'il s'agit de la représentation symbolique d'une domination universelle sur le mode sauvage. Ces attributs sont souvent ceux des antiques divinités asiatiques, les déesses mères orientales ayant souvent des caractéristiques identiques. On retrouve ici le désir de syncrétisme des grecs.

Sur son ventre on remarque des protubérances en grappe dont on ignore la nature. Ces oves ont toujours beaucoup intrigué et donné lieu à diverses hypothèses. Seins, testicules, œufs, … Leur si grand nombre fait immédiatement penser à une célébration de la fertilité, car on connaît d'autres exemples d'amplification des attributs féminins ou masculins. Toutefois,  comme  on ne trouve cette multimammie chez aucune autre déesse grecque, il faut aller en chercher l'origine ailleurs. Les commentateurs modernes ont remarqué assez vite que ces "seins" ne faisaient pas partie de l'anatomie de la déesse. Ils sont généralement placés très bas, juste au-dessus ou au niveau de la ceinture,  et, surtout, ils semblent posés par-dessus le vêtement. Il s'agit donc à l'évidence de postiches, portés en pendentifs.

Il existe une hypothèse qui offre l'avantage de prendre en compte l'aspect arboricole, et donc végétal  de la statue.  En ce cas, tout en gardant la même symbolique, on peut très bien considérer que ces oves sont des grappes de fruits. Dans son mémoire,  J.-P. Montbrun voit là une représentation symbolique d'un palmier dattier. Les chapelets évoquent en effet de façon plausible des fruits disposés en régime à la manière des dattes ;  le bas du corps,  tronc  plongeant ses racines dans le sol, rappelle, plus que tout autre arbre, le stipe du palmier ; la coiffe qui prolonge fréquemment la statue vers le haut fait, dans certains cas, penser au  bouquet des palmes ; on retrouverait même l'aspect de l'écorce dans le quadrillage compartimenté où sont représentées les figures animales. Si l'on ajoute que le mot grec φοῖνιξ (phoinix) est toujours du genre masculin, qu'il s'agisse d'un arbre mâle ou femelle, on se dit que cette version présente l'avantage de réunir les hypothèses précédentes formulées à propos des seins, des testicules ou des œufs, tout en rappelant les origines "xoaniennes" de la statue. Ceci nous rapproche toujours encore de la représentation des déesses mésopotamiennes, comme les poteaux d’Astarté, tant décriés par les prophètes dans la Bible. Ces représentations arboricoles revoyaient au principe de l’arbre de vie biblique.

Sur sa tête la couronne en forme de tours, renvoie à l’antique Cybèle protectrice des cités et des villes. La tour rappelle qu’Artémis est la déesse protectrice et tutélaire de la ville, comme un rempart ou une muraille qui protège ses habitants.

Le clergé de Diane/Artémis

Le grand prêtre du temple d'Artémis, à son entrée en fonction, abandonnait son nom profane pour celui de "Mégabyse".  Cette coutume a aussi une origine orientale qui s'appliquait aux souverains assyriens, tel Assurbanipal. L'étymologie doit être recherchée du côté de la langue persane et non du grec. Le mot pourrait venir de l'association de   "baga" (Dieu) et de "yasa" (sacrificateur) ou" bazu" (bras). Le Mégabyse serait donc le « sacrificateur de la divinité » ou le « bras de la divinité ». Le Mégabyse était castré. L'éviration (terme propre pour désigner la castration humaine) a parfois été comprise comme une volonté d'Artémis de n'accepter de prêtre masculin que s'il était amputé de sa virilité. C'est une hypothèse plausible, mais, outre qu'on n'en retrouve aucune autre trace ailleurs dans le culte de la déesse, elle semble totalement étrangère à la mentalité grecque et à sa religion. Pour expliquer cette coutume, il faut encore se tourner vers l'orient. En Syrie, en Mésopotamie et en Perse, plusieurs cultes exigent de leurs prêtres un tel sacrifice. Souvent associé à d'autres mutilations et à des flagellations. Pourtant, sur la question des mutilations sexuelles, il existe un véritable fossé culturel entre l'orient et l'occident antiques. Dans le monde gréco-romain, celles-ci sont réprouvées, considérées comme sacrilèges ou interdites. En Lydie et en Phrygie, au contraire, l'eunuchisme est traditionnel et c'est sans doute une des raisons pour lesquelles l'Anatolie était un grand fournisseur de Mégabyses. Voilà qui nous rappelle, si besoin était, que, par sa situation géographie et son histoire,  Ephèse est au carrefour de plusieurs cultures et civilisations. Ephèse représente le trait d’union entre la culture mésopotamienne antique et l’occidentale en assurant la continuité des cultes sous d’autres noms et formes, mais en gardant les grandes lignes religieuses de l’origine.

Le Mégabyse joue le rôle de gouverneur de l'Artémision et jouit à ce titre d'une  autonomie quasi totale vis-à-vis des autorités civiles de la cité. La situation excentrée du sanctuaire, en dehors des murailles, favorisant cette indépendance, il cumule des fonctions religieuses, administratives et politiques. Il est le maître de cérémonie pour tous les cultes rendus à Artémis, assisté dans ces tâches par une véritable armée de prêtres et de prêtresses vierges à l'intérieur - et souvent hors - de l'enceinte du sanctuaire.  Il  est donc d'abord sans doute le grand sacrificateur. Il a d'abord la responsabilité de la gestion du clergé. Les prêtres et les prêtresses sont placés sous sa garde, et il doit veiller à leur chasteté, situation parfois difficile pour le gardien comme pour ses ouailles.

Mais son rôle le plus important est celui de gardien du trésor. Le sanctuaire recèle des objets d'une valeur considérable, venus de tout le monde antique, comme offrandes à la déesse ou hommages au clergé. De plus, du fait de son autonomie et de son caractère inviolable et sacré, l'Artémision  fonctionne  comme un coffre-fort dans lequel des personnages importants viennent, parfois de très loin, déposer une partie de leur fortune en argent ou objets précieux. Le Mégabyse règne donc sur un véritable trésor, et fait office de banquier.

Le grand prêtre présidait également les Artemisia. Tous les grands centres culturels et spirituels du monde grec antique ont leurs fêtes et leurs jeux. Ephèse ne fait pas exception ; les "Artemisia" ou "Ephesia", sont  fort réputées et attirent une foule de visiteurs et de pèlerins. Dans le calendrier ionien, il existe un mois d'Artémision et on sait, grâce à diverses inscriptions, qu'à l'époque romaine du moins, il s'agissait d'un mois sacré pendant lequel se déroulaient la plupart des cérémonies. Ces jeux ressemblaient beaucoup aux jeux olympiques.

Le Mégabyse sera un prototype du futur roi-prêtre chaste ordonnateur du trésor et qui sera dédié à la Reine du ciel. 

Lutte entre le christianisme et le paganisme

Si je souligne ainsi les caractéristiques de la déesse et du clergé, c’est qu’Ephèse sera le centre d’une bataille spirituelle essentielle, qui se poursuivra bien après la destruction de la ville et de son temple. Ephèse fut le creuset où le culte païen de la déesse-mère fut christianisé et transformé en dévotion fervente vouée à Marie faite « Mère de Dieu ». Lors du synode d’Alexandrie en 430 et du concile d’Ephèse en 431 commença la marche triomphale de la Vierge Marie. Ephèse n’est pas un hasard, là-bas, à l’ère paléochrétienne, il y avait encore un culte suprême de la déesse Artémis. La ‘grande Artémis des Ephésiens’, comme on l’appelait autrefois, se transforma alors en la ‘grande, auguste et glorieuse Marie, Mère de Dieu’ du Christianisme, en l’occurrence, la célèbre Vierge Noire. En se métamorphosant de la sorte, l’ancienne déesse ne changea pas seulement de nom, mais aussi de nature. Marie obtint le statut d’une image divine et sublime qui l’éleva au-dessus de tout ce qui était humain.

D’autres divinités célèbres connaitront le même sort qu’Artémis. Le Parthénon qui vouait un culte à Athéna connaîtra un destin identique au temple d’Ephèse, il est demeuré quasiment intact pendant plusieurs siècles. Il l'était probablement au IVe siècle, alors qu'Athènes n'était plus qu'une bourgade provinciale de l'Empire romain. Vers le Ve siècle, la statue d'Athéna sera enlevée et emmenée à Constantinople par un empereur romain, où l’on perd ensuite sa trace. Puis au VIe siècle, le Parthénon sera transformé en Église consacrée à la Vierge Marie. La cathédrale de Syracuse n'est autre que le naos de l'ancien temple d'Athéna. On pourrait multiplier les exemples, comme Santa Maria sopra Minerva, une Église de Rome érigée sur un temple dédié à Minerve. On mesure le caractère symbolique de la reprise par la Vierge Marie de ces anciens temples païens. Le paganisme antique se pérennisa ainsi grâce au dogme marial et le lien antique du culte de la déesse Mère pouvait poursuivre son cheminement au fil des siècles. Le diable avait trouvé là sa nouvelle figure emblématique pour être adoré.

Le Christianisme, après qu’il eût conquis Rome et la Méditerranée, ne réussit pas à exterminer définitivement la déesse méditerranéenne. Son souvenir survécut des siècles durant. C’est la raison pour laquelle les évêques romains trouvèrent un substitut féminin qui ne portait pas préjudice à leurs intérêts de domination et qui, en même temps, était en mesure de combler la nostalgie profonde des hommes d’une divinité féminine et maternelle. Ils y réussirent avec une adresse remarquable du moment qu’ils redécouvrirent la mère de Jésus et la mythifièrent en tant que Vierge Marie qui a donné naissance à Dieu et en tant qu’intermédiaire privilégiée avec son Fils.

Mais la mariologie ne sera pas le fait du premier âge de l’Eglise, ça viendra plus tard avec l’avènement des papes. Il faut rappeler que le concile d’Ephèse n’est pas centré sur une approche mariale, mais christologique : l’enjeu du concile d’Ephèse étant de tenir la réalité de l’union des natures – divines et humaines – dans le Christ face à une pensée nestorienne cherchant à distinguer le Verbe de Dieu de l’homme Jésus. L’enjeu était de taille, car si la réalité de cette union dans le Verbe incarné n’était pas effective alors le Christ n’était pas médiateur entre Dieu et les hommes. Nous le voyons la problématique du concile d’Ephèse est avant tout christologique et ce concile tranchera la problématique en faveur d’une unité substantielle du Christ, ce qui aura comme conséquence de confirmer le titre de Marie Théotokos, qui était déjà usité depuis plus d’un siècle. La tradition chrétienne antérieure au concile d’Ephèse a toujours compris le titre de Théotokos du côté de la génération humaine, Marie n’étant pas mère selon la divinité, mais selon l’humanité de Jésus, Marie est « accoucheuse de Dieu ». Pour les Pères de l’Eglise il était clair que Marie était une personne historique, il ne pouvait donc se faire aucune analogie avec une déesse. La conception du concile d’Ephèse ne se réfère donc pas à un culte des déesses du moment ou encore avec celles qui ont précédés : « la grande mère », Artémis, Astarté, Isis, etc. Épiphane de Salamine – le premier père de l’Église par lequel nous a été transmis un témoignage sur la virginité perpétuelle de Marie – aura l’occasion d’exprimer très clairement sa position en condamnant les mouvements Philomarianistes et Collyridiens d’hérésie : ces deux mouvements avaient comme point commun de considérer Marie comme une déesse et lui offrait des pains en sacrifice.

Cependant le ver est dans le fruit et l’image de la vierge Marie va évoluer dans le temps. Dès le début du V° siècle, le 15 août, la fête de Marie Theotokos (Marie mère de Dieu) est instituée sous la forme de la Dormition. Mais Jean Damascène mort en 759 distingue bien l'adoration due à Dieu seul et la vénération destinée à Marie. En 649, au concile romain du Latran, Marie a été déclarée, " toujours vierge " par Martin Ier, puis réaffirmé au troisième Concile de Constantinople, en 681.  Le pape Sixte IV, en 1476, se prononce en faveur de la fête de l'Immaculée Conception, et interdit d'attaquer la croyance qui tient que la Vierge Marie a été préservée de la souillure du péché originel. L'Immaculée Conception est un dogme, qui a été défini par le Pape Pie IX, le 8 décembre 1854, par un privilège de Dieu, le Père et en regard des mérites de Son Fils rédempteur, Marie fut préservée, dès sa conception, de la tache du péché originel. L'Assomption de la Vierge Marie a été proclamée le 1er novembre 1950, par le Pape Pie XII : "Marie, l'immaculée mère de Dieu, toujours vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste." Marie proclamée " Mère de l'Église " par Vatican II. En promulguant la constitution dogmatique "Lumen Gentium" lors du concile Vatican II, le 21 novembre 1964, le pape Paul VI a déclaré la Vierge Marie "Mère de l'Église". Le concile Vatican II est à lui seul, une somme de connaissances, que l'on explore sans cesse et pas encore épuisé !...Renouveau de l'Église, œcuménisme…

Toutes ces évolutions sont on le voit, le fait d’une seule Église, l’Église catholique qui progressivement détruit l’image du Christ pour restaurer celle de l’antique Reine du Ciel. Parallèlement au culte marial s’établit l’autorité papale, qui place les évêques comme pasteurs de l’Église, établissant également une autorité temporelle sur la spirituelle qui était celle des origines de l’Église de Jérusalem. Une déviance en apporta donc une autre, qui transformera le catholicisme en nouvelle Babylone, qui sera son nom emblématique dans le livre de l’Apocalypse.

La ville d’Ephèse est donc symbolique quant aux dérives qui vont survenir dans la suite des âges des Eglises, car les bases sataniques sont déjà posées. Au culte d’Artémis est associé celui de l’empereur, nous l’avons vu plus haut. Des inscriptions et des médailles nous révèlent que la ville s’enorgueillissait d’être la gardienne du temple d’Artémis et des empereurs pontifex maximus. Dans la Rome antique, pontifex maximus (grand pontife) est le titre donné au pontife à la tête du collège pontifical. Ce titre est le plus élevé de la religion romaine. Cette dignité leur octroie le contrôle de la vie religieuse officielle. Les empereurs romains porteront ce titre du 1er au 4ème siècle. En 382, l'empereur Gratien, parmi de nombreuses mesures contre les religions anciennes, refusa de porter ce titre. Le titre n'est alors plus porté pendant des siècles, jusqu'à ce que le pape Théodore Ier le reprenne en 642. Aujourd'hui, le titre Pontifex maximus est réservé au pape - également appelé Souverain pontife (Summus pontifex) ou Pontife romain (Pontifex romanus). Le règne d'un pape est appelé pontificat.

L’approche historique de la ville d’Ephèse est donc essentielle pour comprendre les symboles que Jésus veut en tirer dans le livre de l’Apocalypse. A Ephèse l’Église va grandir et progressivement s’imposer face à sa grande concurrente païenne représentée par le culte de Diane/Artémis. Mais attention, si l’Église fondée par Paul fut victorieuse, il n’en sera pas de même par la suite avec celles qui lui succéderont. L’Église d’Ephèse révèle en fait deux semences cachées qui vont commencer à croître ensemble, celle de l’Église du Christ et celle du serpent qui va devenir universelle au travers du catholicisme. Il convient donc de considérer la ville dans son symbole par rapport à l’âge biblique qu’elle représente et non à la seule petite Eglise qui s’y forma du temps de l’apôtre Paul, car le caractère local est ici secondaire.

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