http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: L'âge de l'Eglise de Smyrne 2

lundi 25 novembre 2013

L'âge de l'Eglise de Smyrne 2

Apocalypse 2 : 9  Je connais ta tribulation et ta pauvreté bien que tu sois riche, et les blasphèmes de la part de ceux qui se disent Juifs et ne le sont pas, mais qui sont une synagogue de Satan.

Avant d’attribuer ce verset à l’âge en entier, il faut tout d’abord étudier le contexte spécifique de la ville au temps des premiers chrétiens avant toute extrapolation. Les Smyrniotes étaient très fiers de leur ville, de ses écoles de science et de médecine. Ils voulaient être les premiers en beauté, les premiers dans le culte impérial, les premiers pour la culture (la ville n’était-elle pas le lieu de naissance d’Homère ?). Mommsen a appelé Smyrne « le paradis de la vanité municipale ». Sa richesse et son opulence contrastaient avec la pauvreté des chrétiens y habitant.

A l’époque de Domitien, le culte de César devint obligatoire : une fois par an, chaque citoyen romain devait déposer quelques graines d’encens sur l’autel de l’empereur en disant : Kaisar Kurios (César est Seigneur). Après cela, il recevait un certificat attestant qu’il avait rempli ses devoirs civiques. L’un de ces certificats que l’on a retrouvé porte : « Nous, Serenas et Hermas, représentants de l’empereur, nous t’avons vu sacrifier ». Mais c’est précisément ce qu’un chrétien ne pouvait pas faire, car pour lui il n’y avait qu’un seul Seigneur : Jésus-Christ. « Nulle part la vie était plus dangereuse pour un chrétien qu’à Smyrne », à cause du zèle patriotique des autorités municipales, augmenté de l’opposition toujours plus vive des juifs attachés au pharisianisme.

Quelques explications sont nécessaires pour comprendre le sens prophétique attribué aux juifs dans ce verset. Jusqu'à la deuxième destruction du Temple, les sadducéens incarnaient le pouvoir sacerdotal, et par là-même religieux et politique du peuple hébreu. Le refus de la tradition orale constituait alors la garantie de leur pouvoir, incarné dans la Torah écrite et le Temple, car les sadducéens n'acceptaient que la Torah, et elle seule, comme source de halakha (les prescriptions de la Loi). Les pharisiens, minoritaires au départ, et dépourvus d'autorité propre, fondèrent leur pouvoir sur la connaissance de la tradition orale, et la finesse de leurs interprétations. Cependant, après la deuxième destruction du Temple, les prêtres perdirent le lieu de leur pouvoir, alors que les pharisiens, devenus rabbins, asseyaient la leur sur la Torah orale. Comme seul autorité religieuse restante dans le judaïsme, ils imposèrent le Talmud comme une composante inaliénable de la foi juive.

Après la deuxième destruction du Temple, les successeurs des pharisiens, les docteurs de la Loi, portent désormais le titre de rabbi (littéralement "mon maître" en hébreu) et prennent en main le destin de la communauté israélite dispersée en diaspora dans le monde romain. Ils créent un judaïsme sans temple et ouvrent des académies à Yavné, puis en Galilée, afin de se livrer à un travail d'interprétation de l’Écriture suivant des canons d'herméneutique qui s'affinent progressivement et mettent en ordre les traditions transmises. Lorsque les circonstances politiques agitant la Judée au IIe siècle menacent la pérennité de cet enseignement, il est décidé de procéder à la mise par écrit de celui-ci. Ces travaux sont consignés dans les recueils dits 'Midrachei Halakha', qui offrent un commentaire des textes législatifs du Pentateuque, verset par verset. On considère généralement qu'aux alentours du Ier siècle, la rédaction de la Mishna est entamée, les lois et leurs interprétations étant organisées non plus par verset biblique, mais par thème. Elle est clôturée par Rabbi Yehouda Ha-Nassi, aux environs de 200. Du IIIe au Ve siècle, les rabbins (désormais appelés Amoraïm et non plus Tannaïm) se donnent pour tâche d'élucider les textes de la Mishna, de les commenter, d'en rechercher les sources bibliques et d'en concilier les contradictions apparentes, et cela tant en Palestine qu'en Babylonie. La rédaction du Talmud s'achève aux environs de l'an 500. Cependant, alors que le midrash prend le texte biblique pour point de départ afin d’en tirer des lois qui, pour en être inspirées, n’y sont pas écrites, le Talmud vise à retrouver les versets dans ces lois orales. A la fin le judaïsme s’enferrera dans des pratiques religieuses que Dieu n’a jamais prévu et voulu pour son peuple, car tirée de la seule imagination de théologiens abordant les Écritures saintes d’un point de vue académique et scientifique et non inspiré. L’abandon de la pure lecture de la Parole de Dieu va conduire le peuple juif à se détourner du christianisme et du Mashiah, pour marcher pendant 2000 ans dans les ténèbres au sein des nations.

Débarrassés de l’autorité du sanhédrin et de l’influence des sadducéens, les pharisiens ont reconstitué une synagogue nouvelle dans laquelle les juifs vont vivre une vie religieuse  sous l’autorité de rabbins que Jésus lui-même qualifia de fils du diable. Luc 11 : 44 Malheur à vous, [spécialistes de la loi et pharisiens hypocrites,] parce que vous êtes comme des tombeaux qu'on ne remarque pas et sur lesquels on marche sans le savoir. 45 Un des professeurs de la loi prit la parole et lui dit: «Maître, en parlant ainsi, c'est aussi nous que tu insultes.» 46 Jésus répondit: «Malheur à vous aussi, professeurs de la loi, parce que vous chargez les hommes de fardeaux difficiles à porter, que vous ne touchez pas vous-mêmes d'un seul doigt. 47 Malheur à vous, parce que vous construisez les tombeaux des prophètes que vos ancêtres ont tués. Jésus éclaircit encore les choses en Jean 8 : 39  Ils lui répondirent : Notre père, c’est Abraham. Jésus leur dit : Si vous étiez enfants d’Abraham, vous feriez les œuvres d’Abraham. 40,  Mais maintenant vous cherchez à me faire mourir, moi qui vous ai dit la vérité que j’ai entendue de Dieu. Cela, Abraham ne l’a point fait. 41  Vous faites les œuvres de votre père. Ils lui dirent : Nous ne sommes pas des enfants illégitimes ; nous avons un seul Père, Dieu. 42  Jésus leur dit : Si Dieu était votre Père, vous m’aimeriez, car c’est de Dieu que je suis sorti et que je viens ; je ne suis pas venu de moi-même, mais c’est lui qui m’a envoyé. 43  Pourquoi ne comprenez-vous pas mon langage ? Parce que vous ne pouvez écouter ma parole. 44  Vous avez pour père le diable, et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement, et il ne se tient pas dans la vérité, parce qu’il n’y a pas de vérité en lui. Lorsqu’il profère le mensonge, il parle de son propre fonds ; car il est menteur et le père du mensonge.

Le christianisme à l’origine était pleinement d’origine juive et s’exprimait et se diffusait exclusivement au travers des synagogues. Mais à cause de l’influence des pharisiens, les chrétiens juifs seront progressivement rejetés des synagogues et se constitueront en assemblées nouvelles appelées Églises, auxquelles s’adjoindront des prosélytes toujours plus nombreux issus du monde païen. La scission entre les deux communautés se fera pendant l’âge de Smyrne et la ville sera symptomatique du fait.

 Les juifs attachés au pharisianisme, formaient une colonie nombreuse et bien considérée dans la ville de Smyrne. La destruction de Jérusalem en l’an 70 l’avait encore multipliée par un afflux massif de réfugiés. Mais au sein de cette communauté, une Église se forma progressivement comme un groupe particulier parmi les juifs. Ces juifs chrétiens ne reconnaissaient pas la loi orale comme fondamentale, car l’enseignement de Jésus lui était supérieur et ils se démarquèrent du pharisianisme. Ainsi, « ceux qui se disent Juifs mais ne le sont pas » sont des Israélites attachés à leur appartenance ethnique comme à une garantie de la faveur divine (cf. Jn 8.33ss) et ils s’opposaient de toutes leurs forces aux chrétiens qui prétendaient être à présent le véritable Israël, le peuple de Dieu (cf. Rm 2.28 ; Ga6.15; Ph 3.23). La « synagogue de Satan » sera donc formée par des juifs que Dieu ne reconnaîtra plus comme tels et qui s’opposeront violemment à l’Église naissante. Les pharisiens plus que les païens, seront les plus virulents adversaires du christianisme au début et ils exciteront les autorités à s’attaquer aux chrétiens, oubliant en faisant cela ce que Rome fit au peuple juif en rasant le Temple.

Les chrétiens ont d’abord profité d’une certaine protection dans l’Empire romain parce qu’ils étaient associés au judaïsme qui était toléré par Rome. Les Juifs n’étaient pas obligés d’adorer César. Ils pouvaient honorer les empereurs non comme des dieux, mais comme des dirigeants. Mais une fois jeté hors des synagogues, les chrétiens juifs n’étaient plus considérés comme tel et relevaient alors de l’administration commune de la cité, c’est-à-dire qu’ils devaient prouver leur loyauté à la cité en honorant l’empereur comme un dieu et cela les pharisiens le savaient très bien.

Les juifs traditionnels étaient irrités et jaloux de voir des gens, juifs, prosélytes ou craignant Dieu, membres de leurs synagogues ou païens, se convertir au christianisme et voir les dons charismatiques se développer en leur sein. Ces dons de l’Esprit prouvaient de manière évidente que Dieu était avec les chrétiens. On peut penser que par jalousie et crainte de perdre leur autorité, les pharisiens étaient heureux de faire savoir aux autorités romaines que les chrétiens n’étaient pas une faction juive, mais une religion nouvelle différente d’eux. Car les pharisiens voyaient le christianisme comme une religion qui rejetait la loi de Moïse et qui blasphémait en adorant un criminel crucifié. Plusieurs passages du Nouveau Testament et d’autres sources extrabibliques nous font savoir que les pharisiens étaient tout à fait à l’aise de s’allier aux païens et aux autorités romaines pour opprimer les chrétiens, l’exemple même de Saul de Tarse le prouve. Ils soulevaient des foules contre eux, les traînaient en justice, les accusaient faussement de causer du désordre, etc. (Actes 13:45,50; 14:2-7; 17:5-9; 1 Thessaloniciens 2:14-16). En plus, comme la ville de Smyrne était réputée pour sa grande loyauté envers Rome et la religion romaine, ses habitants pouvaient avoir moins de patience avec des chrétiens qui refusaient de rendre hommage à la divinité de l’empereur.

Les Juifs de Smyrne proféraient des “calomnies” contre ces chrétiens, ce qui leur causait des tribulations et des souffrances, incluant des difficultés économiques. A cause de leur position radicale face au culte de l’empereur, un certain ostracisme était jeté sur eux. Ecarté des ligues et des corporations, travailler ou faire du commerce était devenu très difficile et la pauvreté c’était abattu sur eux. La misère matérielle était leur lot quotidien. Le Seigneur leur rappelle leur condition non pour qu’ils s’apitoient sur leur sort, mais pour les encourager. Il leur dit: “Je connais ta pauvreté, et pourtant tu es riche.” Il ne leur dit pas seulement: “Console-toi, aujourd’hui tu es pauvre, un jour tu deviendras riche”. Non! Tu es riche dès aujourd’hui!
 
Le Seigneur dit également que les juifs en agissant ainsi blasphèment contre Dieu, car en s’attaquant aux chrétiens c’est à Dieu lui-même qu’ils s’attaquent et à Son nouveau Temple en construction au travers de l’Église. L’exemple de Paul est édifiant en la matière, durant son arrestation à Jérusalem, Paul s'adresse à la foule et décrit les circonstances de sa conversion. Acte 22 : « Je faisais route et j'approchais de Damas, quand tout à coup, vers midi, une grande lumière venue du ciel m'enveloppa de son éclat. Je tombai sur le sol et j'entendis une voix qui me disait : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? ». Je répondis : « Qui es-tu, Seigneur ? ». Il me dit alors : « Je suis Jésus le Nazaréen, que tu persécutes ».

La haine du rabbinat contre les chrétiens peut se mesurer à l’aune de leur liturgie. Très tôt, entre les années 85 et 95, la prière Birkat ha minim semble avoir été intégrée à la prière liturgique dite des « 18 bénédictions » Amidah. Elle dit : « Pour les apostats, qu’il n’y ait pas d’espoir. Que le royaume de l’impertinence [l’empire romain] soit déraciné de nos jours, et que les notsrim et les minim disparaissent en un instant. Qu’ils soient effacés du livre de la vie et ne soient pas inscrits avec les justes. Béni sois-Tu Seigneur, Qui soumets les impudents ». Les nazoréens (les chrétiens) et les minim (sectaires hétérodoxes) ne peuvent plus alors participer à la liturgie synagogale, car ils sont dans l’incapacité de prononcer la Birkat ha minim. La rupture est alors consommée entre ce judaïsme rabbinique et le christianisme. Cependant, ce que les rabbins ignoraient, c’est que cette prière sous forme de malédiction se retournera contre eux et les poursuivra au fil des siècles. En effet, comment Dieu aurait-Il pu effacer du livre de vie ce qui est inhérent à sa propre personne ?

Etant ennemis des enfants de Dieu, les juifs étaient devenus une « synagogue de Satan », car ils se faisaient les auxiliaires du « diable », de l’Accusateur, en accusant les chrétiens auprès des autorités. La haine des Juifs de Smyrne s’est manifestée dans toute sa virulence quand ils ont incité les autorités à se saisir de Polycarpe, le disciple de Jean et responsable de l’église de la ville : « C’est lui celui qui enseigne toute l’Asie, le père des chrétiens, le destructeur des dieux, qui enseigne à beaucoup à ne pas sacrifier aux dieux ni à les adorer » (Martyre de Polycarpe). Polycarpe mourut sur le bûcher un jour de shabbat. Violant l’interdiction du shabbat, les Juifs furent les plus zélés à apporter des fagots pour alimenter le feu. La chose est particulièrement remarquable dans le fait qu’il est expressément interdit de faire du feu le jour du shabbat, mais là en la circonstance, les juifs traditionalistes ont su faire preuve d’une belle entorse à la Loi pour assouvir leur haine. En agissant ainsi, la communauté israélite allait clore un âge et en commencer un nouveau. Celui de la séparation des communautés qui au départ n’en faisait qu’une.

Ainsi l’âge de Smyrne sera celui où lorsque le Seigneur parle des juifs, il le fera de manière péjorative, comme une communauté distincte de Sa personne et devenue ennemie de Son peuple. La synagogue peut alors être mise en perspective avec l’Église, ce qui était impossible dans l’âge d’Éphèse où les communautés étaient confondues. Bien que frère comme l’étaient Esaü et Jacob, l’Éternel haïra le premier et aimera le second. La synagogue dans l’âge de Smyrne est définitivement devenue celle de Satan. Le Seigneur va alors se détourner des juifs pour se tourner vers les nations où l’Église va maintenant se développer et grandir pour conquérir le monde entier. Les centres d’autorités et d’enseignements vont aussi se déplacer géographiquement et s’éloigner de plus en plus de Jérusalem et même définitivement quitter l’Asie. La page juive dans l’Histoire de la chrétienté va se tourner pour une longue période, jusqu’à ce que le temps des nations soit achevé.

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