http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: La franc-maçonnerie dans ses symboles 9

vendredi 22 février 2013

La franc-maçonnerie dans ses symboles 9



Nous avons vu comment Napoléon a blessé à mort l’Eglise au travers de Pie VI. Il s’agit maintenant de rapprocher l’Histoire et les Ecritures, pour comprendre comment le sixième roi (tête de la bête) va tomber sous l’action du 7ème roi, qui doit rester peu de temps. Comme d’habitude un recours à l’Histoire passée est nécessaire pour recoller tous les éléments ensemble.

La manière dont l’ange s’exprime avec l’apôtre Jean au moment où l’Apocalypse lui est révélée, nous permet de situer les choses dans un ordre chronologique. Il apparait que deux choses sont dissociées et n’évoluent pas selon les mêmes cycles de temps. En Apocalypse 17 : 8  on parle au passé et au futur : « La bête que tu as vue était, et elle n’est plus. Elle doit monter de l’abîme, et aller à la perdition. Et les habitants de la terre, ceux dont le nom n’a pas été écrit dès la fondation du monde dans le livre de vie, s’étonneront en voyant la bête, parce qu’elle était, et qu’elle n’est plus, et qu’elle reparaîtra. » Puis immédiatement dans le verset qui suit où l’on parle des têtes, ou dit autrement, des rois qui sont à la tête des empires qui se succèdent, le temps est au présent : Ap : 10  « Ce sont aussi sept rois : cinq sont tombés, un existe, l’autre n’est pas encore venu, et quand il sera venu, il doit rester peu de temps. »

La bête est donc un ensemble politico-religieux qui n’existait plus du temps de l’Apôtre Jean, mais quireviendra après lui. Babylone la grande, la mère des impudiques et des abominations de la terre, est la référence qui renvoie au passé et au futur, mais que l’Empire romain ne représentait pas. Car par son culte, cette civilisation avait porté au sommet du panthéon la Reine du Ciel, Ishtar. Ishtar est représentée sur sa célèbre porte à Babylone sous la forme du lion et symbolisait la royauté divine, le taureau du dieu Marduk représentait le roi comme guide du troupeau terrestre. Dans la porte d’Ishtar tout est donc dit et symboliquement représenté, d’où le nom de Babylone, la Porte des dieux. Le roi de Babylone représente le pontife (le pont) qui permet de faire le lien avec le divin en s’unissant avec une prostituée sacrée représentant la déesse Ishtar. L’union s’effectuait pendant la grande fête annuelle de l’Akitu. Tout cela est plus développé dans l’étude sur les cathédrales si on veut en savoir plus. Cet ensemble unissant la Reine du Ciel au roi, disparaitra dans les empires suivants.

Le catholicisme qui a rétabli le culte de la Reine du Ciel en imposant le culte marial conduit par le pontife de Rome, a permis à la bête de retrouver sa forme originelle telle que le Seigneur la conçoit dans l’Apocalypse et tel que le diable le souhaite. La Révolution française va faire vaciller la restauration babylonienne et presque la tuer en frappant le pontife romain. Mais Napoléon en prenant le pouvoir impérial, va sauver le catholicisme et indirectement la bête, pour uniquement lui adjoindre une tête supplémentaire.

La bête de l’Apocalypse est un ensemble de civilisations qui sont unies dans un même esprit, pour arriver à un même but sous la conduite occulte de Satan. Ce sont des générations successives que le Seigneur appelle la semence du serpent dans la Genèse. Cette semence diabolique issue de Caïn ne se contente pas de se répandre sur la Terre, elle cherche à croître spirituellement et intellectuellement dans l’esprit de l’homme. C’est le principe biblique de la marque sur le front, qui consiste à graver dans les consciences des principes bibliques ou sataniques selon l’esprit qui domine sur vous. Voyons maintenant comment cette logique s’inscrit dans la constitution de la 7ème tête de la bête.

C'est sous Napoléon que la France connut d'importantes réformes qui contribuèrent à forger l'identité du pays à la suite de la Révolution, et font de lui un des pères de nos institutions. Après la Révolution, les Français ont obtenu de nouvelles libertés, et acquis l'égalité civile. Libérés du joug féodal et des prélèvements du clergé (dîme), les paysans restaient sous l'influence de bourgeois, qui s'enrichissaient et constituaient de grandes propriétés. Mais tous sans exception souhaitaient la tranquillité, la stabilité économique, la fin des bouleversements politiques et de l'insécurité dans les campagnes. C'est le but que s'était fixé Bonaparte, alors Premier Consul.

Bonaparte opère dès les débuts du Consulat de nombreuses réformes dans l’éducation, la justice, la finance et le système administratif. Son ensemble de lois civiles est connu sous le nom de Code Napoléon de 1804. La période du Consulat est considérée comme la période la plus bénéfique et prolifique du règne de Napoléon. En effet, durant cette période, Bonaparte réorganise tout et pose ce qui apparaitra ensuite comme les fondations de l’État des XIXe et XXe siècles en France ; ainsi la quasi-totalité des réalisations de Bonaparte existent-elles encore au début du XXIe siècle malgré les réformes successives. Durant cette période, la France voit son économie redynamisée, son administration réorganisée, une justice plus performante, une éducation développée et la paix retrouvée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Si les choses s’étaient arrêtées au niveau du consulat, nous aurions eu une bête blessée à mort, mais pas une nouvelle tête pour remplacer celle de l’ancien Empire romain et de son pontife. Mais Napoléon veut être plus que le premier consul, car il veut égaler les plus grands monarques, tel que les empereurs romains ou Charlemagne. Pour cela il doit conquérir comme eux, les mêmes terres pour symboliquement récupérer leurs couronnes. La campagne d’Italie a déjà permis la conquête de Rome, la victoire d’Austerlitz permettra de conquérir celle du Saint Empire et de devenir l’égale de Charlemagne. Surnommée la « bataille des Trois Empereurs », Austerlitz sera la page d’Histoire profane qui mènera vers la 7ème tête à la bête, car le principe de Saint Empire disparaitra à ce moment-là, pour laisser la place à l’Empire napoléonien.

Mais pour que cela soit réellement une bascule vers une nouvelle page de l’Histoire et non un simple déplacement d’autorité d’une tête couronnée vers une autre, il faut que l’Eglise catholique ne soit plus l’organisatrice des pouvoirs. C’est là que le maçonnisme va prendre toute sa place dans les évènements historiques qui vont bouleverser les temps et les institutions. Pendant la campagne d’Italie, Bonaparte exécutait fidèlement les ordres du gouvernement français et c’est donc la France qui blessa mortellement la bête. Mais en revenant d’Egypte où Napoléon fut initié, son état d’esprit changea radicalement et désormais la conduite de la France se ferait selon les règles de ce nouvel esprit maçonnique.

Une curieuse alchimie ésotérique, philosophique et religieuse s’est opérée en Egypte sur Napoléon, qui va se retrouver dans sa manière de gouverner le pays. Cette antique contrée fascine la fin du XVIIIe siècle. Comme les hiéroglyphes n'ont pas encore été déchiffrés, l'égyptologie se résume alors surtout à une égyptomanie aux tendances ésotériques dans lesquelles puise abondamment la franc-maçonnerie. Elle transparaît ainsi dans la Flûte enchantée que Mozart compose en 1791, comme chez des auteurs préoccupés d'expliquer les religions. L'Egypte apparaît comme la terre des origines de la civilisation et le lieu d'élection de la sagesse. Mais la mission scientifique jointe au projet va renouveler la perception de l'Egypte. Bonaparte et le Directoire innovent en joignant à une expédition militaire un dispositif utilisé au XVIIIe siècle pour le voyage maritime d'exploration de contrées lointaines. 160 savants sont recrutés pour travailler sous la protection de l'armée. Il ne s'agit pas, comme lors de la campagne d'Italie, de charger quelques commissaires de « la recherche des objets de science et d'art » mais de rassembler des spécialistes pour explorer et étudier le territoire à conquérir. L'expédition d'Egypte est typiquement une entreprise des Lumières par le privilège qu'elle donne à la géographie, à l'étude raisonnée des lieux, du climat, du sol, de la faune et de la flore, de la population. On imagine facilement comment cette ambiance de savants et de francs-maçons a profondément impressionné Napoléon et remodelé sa conception du monde et sa spiritualité.

Pour Napoléon, la religion est désormais devenue un concept intellectuel qui s’intègre dans une voie mystique plus large, que lui en tant qu’illuminé maçon va tenter de parfaire à son image. Selon le principe maçon, il va chercher sa propre voie en explorant le champ de sa conscience selon ses réflexions propres. Le monde va donc devoir s’adapter de grès ou de force à sa conception des choses. À partir du coup d'État de Bonaparte du 18 Brumaire, la franc-maçonnerie va vivre quinze années extraordinaires, multipliant le nombre de loges et d'initiations. Le Premier Consul, va mettre en pratique ses idées nouvelles en donnant à la maçonnerie une place très importante dans sa vie et celle de l’Empire.

Lorsque Napoléon Bonaparte arrive au pouvoir, un texte en neuf articles vient d'être signé le 22 juin 1799 qui organise l'union de la Grande Loge de France (GLDF) et du Grand Orient de France (GODF) ; le texte prévoit le rassemblement des archives des deux obédiences, supprime les privilèges des maîtres des loges de Paris, l'inamovibilité des vénérables, et institue un système d'élection des officiers. Jean-Jacques Régis de Cambacérès va devenir le chef d’orchestre maçonnique qui va diriger cette nouvelle symphonie maçonnique. Décrit par Hippolyte Taine comme « peu brillant par l'esprit » mais possédant « un bon sens rare et un dévouement sans bornes au Premier consul », il joue un rôle de premier plan dans l'élaboration du Concordat et du Code Civil. Il préside cinquante des cent deux séances consacrées à ce travail et assure la documentation de Napoléon Bonaparte lorsque celui-ci assume la présidence.

Le 27 floréal an XII, à la tête du Sénat qu'il préside, il présente à Napoléon Bonaparte le sénatus-consulte qui le proclame Empereur des français. Le même jour, il est nommé Archichancelier de l'Empire, fonction définie par l'article 40 de la Constitution de l'an XII. Bien que surtout d'apparat, elle fait cependant de lui, en théorie, le second personnage de l’État. En tant que grand dignitaire de l'Empire, il est aussi sénateur, conseiller d'État, membre du conseil privé et du grand conseil de la Légion d'Honneur. Afin de contrôler la franc-maçonnerie, Napoléon le nomme par ailleurs, en 1806, Souverain Grand Commandeur du Suprême Conseil de France du Rite Écossais Ancien et Accepté, à la place du comte Auguste de Grasse-Tilly. Le 1er mars 1808, il reçoit les titres de prince et d'altesse sérénissime. Le 19, il est fait duc de Parme. À partir de Cambacérès la maçonnerie va cimenter la Nation française dans un nouvel Etat politique que la restauration ne pourra plus réformer.

Napoléon se méfie toutefois de la franc-maçonnerie, qu'il fait surveiller par l'intermédiaire de Joseph Fouché, et ce bien que les loges aient mis en place son buste dans les temples et que toute contestation du régime soit considérée comme une faute maçonnique grave ; certains ateliers se consacrent d'ailleurs essentiellement à célébrer la gloire de l'Empereur (Napoléomagne, la Française de Saint-Napoléon) quoique d'autres utilisent un signe distinctif rassurant pour dissimuler des activités royalistes subversives (Saint-Napoléon d'Angers). Il y a également sous l'Empire un très fort développement des loges militaires, car Napoléon voit dans la maçonnerie un puissant moyen de cohésion de l'armée, et un outil au service de ses ambitions européennes (en utilisant les sentiments supranationaux qui unissent la fraternité).

Mais Napoléon se méfie tout autant du catholicisme. Sachant qu’il est profondément enraciné dans le pays, il va composer avec en le manipulant du mieux possible. Sa conception des choses se retrouve dans ses déclarations sur l’Ecole. Napoléon est convaincu depuis 1802 que l'enseignement devait reposer sur un triptyque, comprenant les sciences, les humanités et les principes chrétiens. En 1802, la loi sur les lycées ne faisait aucune allusion à la religion. Au contraire, l'obligation pour les proviseurs et censeurs d'être ou d'avoir été mariés laissait penser que l'on voulait écarter les prêtres des fonctions de la direction de ces nouveaux établissements. Après le sacre qui manifeste la volonté de Napoléon de s'appuyer sur l'Église, l'importance de ce socle religieux est confirmée. Napoléon développe devant Champagny l'idée que pour s'affermir dans le pays, l'enseignement doit reposer sur les principes chrétiens : « Dans une nation et sous un gouvernement qui professent le christianisme, il n'y a point d'éducation, si l'on ne forme des élèves chrétiens. Ce n'est pas seulement en attachant à un lycée un aumônier qui y dit la messe le dimanche qu'on atteindra le but. La religion doit être profondément gravée dans le cœur et dans la raison des élèves ». À Fourcroy, il ne disait pas autre chose, même si les mots employés étaient plus rudes : « L'homme sans Dieu, je l'ai vu à l'œuvre en 1793 ! Cet homme-là, on ne le gouverne pas, on le mitraille ; de cet homme-là, j'en ai assez ! Ah ! et c'est cet homme-là que vous voudriez faire sortir de mes lycées ? Non, non ; pour former l'homme qu'il nous faut, je me mettrai avec Dieu ; car, il s'agit de créer, et vous n'avez pas encore trouvé le pouvoir créateur, apparemment ! » Napoléon a conscience que la religion est essentielle pour la société. En plus chef d’un Etat catholique il estime qu’il doit montrer l’exemple, donc il va à la messe le dimanche (même s’il ne communie pas), il réorganise le service de la grande aumônerie. Il pratique jusqu’à sa mort, mais ne communie jamais, même au moment de sa mort, même s’il reçoit l’extrême-onction.

Est-ce à dire que les sentiments de Napoléon étaient partagés ? Pas du tout, il était cohérent avec son idéal maçon. Car en ce temps-là ne pas croire en Dieu interdisait l’accès même aux loges. Dans la version de 1723, le texte fondamental maçonnique est le suivant : "un Maçon est obligé par sa tenure d'obéir à la loi morale; et s'il entend bien l'art, il ne sera jamais athée stupide ni libertin irréligieux. Mais, quoique dans les temps anciens, les Maçons fussent tenus dans chaque pays d'être de la religion quelle qu'elle fût, de ce pays ou de cette nation, cependant il est maintenant jugé plus à propos de seulement les astreindre à cette religion sur laquelle tous les hommes sont d'accord, laissant à chacun ses opinions particulières ; c'est-à-dire d'être hommes de bien et loyaux ou hommes d'honneur et de probité par quelques dénominations ou confessions qu'on puisse les distinguer..." C’est pour cela que j’affirme que le maçonnisme est un cancer du christianisme, car sans lui il n’existerait pas. Mais avec Napoléon il va s’amplifier en y adjoignant le culte païen égyptien, qui va apparaitre sous différentes formes.

Napoléon va donc utiliser le catholicisme comme un outil maçonnique à l’édification de son grand œuvre. Le 23 avril 1804, le tribun Curée présente au Tribunat une motion conférant le pouvoir impérial héréditaire à Napoléon Bonaparte et à sa famille. Le sénatus-consulte du 28 floréal an XII confie le gouvernement de la République à un empereur. « Napoléon Bonaparte, Premier Consul, est Empereur des Français. La dignité impériale est héréditaire. » Le plébiscite de novembre 1804 confère une légitimité nationale à la nouvelle monarchie : la Constitution de l’an XII est approuvée. Mais Napoléon souhaite donner un caractère divin à la dignité impériale.

Le 10 mai 1804, il reçoit le cardinal Caprara et lui exprime son désir d’être sacré par le pape. Le 10 septembre, il invite officiellement le souverain pontife à venir le sacrer à Notre-Dame. Après de longues hésitations, Pie VII finit par accepter. Acclamé tout au long de son parcours à travers la France, le pape arrive à Fontainebleau le 25 novembre 1804. Le Pape a hésité à venir en 1804 mais il espère qu’ainsi il pourra avoir des compensations par rapport au Concordat, et notamment faire abolir les articles organiques qui sont un carcan pour l’Eglise de France. Il doit très vite déchanter. Quand le Pape arrive à Fontainebleau Napoléon oblige sa voiture à s’arrêter dans une allée de la forêt et à faire descendre le Pape dans la boue, il est ainsi humilié. Un tableau de propagande sera commandé pour commémorer la rencontre. Le lieu et les personnages sont très symboliques.


Érigé à la place de l'ancienne croix Saint-Jacques, l’obélisque est la réduction de celui qui se dresse sur la place Saint-Pierre de Rome. Pour le franc-maçon Napoléon, le symbole est fort, car il signe la supériorité du maçonnisme sur le catholicisme. C’est une manière habile d’affirmer dans le symbole ses valeurs spirituelles. Chose qui est parfaitement manifeste dans la posture des acteurs. Napoléon reste droit face au pape et aux prélats qui s’inclinent devant lui.  Napoléon enfoncera définitivement le clou, quand du 19 juin 1812 au 23 janvier 1814, dans les mêmes lieux, Pie VII sera cette fois retenu en captivité. En 1809, l’Empereur fait arrêter le Souverain Pontife et saisit ses états. Le pape est alors détenu à Savonne, puis conduit à Fontainebleau afin de signer un éphémère « concordat de Fontainebleau » que lui extorque Napoléon (25 janvier – 24 mars 1813).

Quelques jours plus tard, pendant le sacre, Napoléon accentuera encore sa marque d’autorité sur le pape. Au-delà de la valeur morale qu’a pu avoir un sacre religieux aux yeux des catholiques, de la valeur symbolique d’un couronnement pontifical rappelant le sacre des empereurs germaniques, Napoléon se place à l’égal, voire au-dessus des rois européens comme successeur de Charlemagne et des empereurs de la Rome antique. La présence du pape au sacre donne une dimension morale et légitime supplémentaire à l’Empire. Celui-ci n’est plus simplement le fruit d’une révolution, c’est un couronnement divin comme celui des autres souverains européens, mais qu’aucun d’eux ne peut égaler. Napoléon se place au même niveau que le souverain du Saint-Empire romain germanique avant de le dépasser pour devenir l'unique empereur en Europe. François II l'avait d'ailleurs bien compris puisqu'après la proclamation de l'Empire français, il décrète que l'Autriche, alors archiduché, devient aussi un Empire.


 Malgré les réserves des Brumairiens, le sacre était le plus sûr moyen de désarmer l'opposition de la Belgique, de l'Italie et de la Vendée profondément catholiques. C'était souligner encore plus cruellement qu'en raison des circonstances, Louis XVIII n'avait jamais été sacré. Pie VII célébra la messe, bénit l'anneau, l'épée, le manteau, le globe, le sceptre et la couronne. Mais Napoléon se couronna lui-même puis couronna Joséphine agenouillée devant lui. Avec le peintre Jean-Baptiste Isabey, David conçoit des costumes chamarrés pour les parvenus et les rudes soldats devenus maréchaux d'Empire ou dignitaires qui doivent assister au sacre. L'empereur lui-même devra traîner un manteau de 22 mètres. Le peintre franc-maçon Jacques-Louis David de la loge de la Modération immortalisera le sacre par une série de tableaux de propagande, où naturellement la symbolique tiendra une grande part.

Après avoir été sacrés, l'Empereur et l'Impératrice montent sur l'estrade. Le pape les bénit en prononçant ces mots : "Sur ce trône de l'Empire que vous affermisse et que, dans son royaume éternel, vous fasse régner avec lui, Jésus-Christ, Roi des Rois, Seigneur des Seigneurs, qui vit et règne avec Dieu le père et le Saint-Esprit dans les siècles des siècles". Puis Pie VII donne l'accolade à l'Empereur et dit : "Vivat Imperator in aeternum", ce à quoi répond l'assistance par des "Vive l'Empereur" et "Vive l'Impératrice". C'est alors que Napoléon prononce son serment civil mentionné dans les témoignages. Enfin, le héraut d'armes proclame majestueusement : "Le très glorieux et très auguste Napoléon, empereur des Français, est sacré et intronisé !". A cet instant précis, la 7ème tête de la bête est formée pour un peu de temps.

La page est tournée, car Napoléon 1er ne reconnait pas l’autorité papale de l’Eglise. Le pontife n’est plus qu’une marionnette entre les mains du maitre des cultes. Cette nouvelle autorité spirituelle s’affirmera dans les symboles comme le veut la tradition maçonnique. Proclamé Empereur des Français, Napoléon aborde pour la première fois le problème des emblèmes de la souveraineté le 23 prairial suivant (12 juin) lors d'une séance au Conseil d'Etat. Le choix d'une nouvelle symbolique, nécessaire pour marquer la rupture avec la monarchie d'Ancien Régime, s'avère difficile. Crétet propose successivement l'aigle, le lion et l'éléphant. Cambacérès préfère les abeilles, puisque la France est une république avec un chef, comme une ruche. Officiellement présenté comme le symbole de Mérovingiens, Cambacérès représentant la maçonnerie ne trompera personne d’initié, puisque ce symbole était très répandu chez les francs-maçons au 19ème siècle. Elle représente les prêtresses du Temple, les Pythonisses, les âmes pures des initiés, l'Esprit, la Parole; car elle purifie par le feu et elle nourrit par le miel; elle brûle par son dard et illumine par son éclat. Sur le plan social, elle symbolise le maître de l'ordre et la prospérité, roi ou empereur, non moins que l'ardeur belliqueuse et le courage. Elle s'apparente aux héros civilisateurs, qui établissent l'harmonie par la sagesse et par le glaive. La ruche représente symboliquement le nouveau temple maçonnique, comme l’Epouse du Christ représente le nouveau Temple. Ici le principe d’inversion et de substitution est clairement exprimé.


Le 21 messidor an XII (10 juillet 1804), l'Empereur raye le lion sur le décret instituant son sceau et ses armes pour imposer l'aigle. Mises au point par Denon, Gay et Biennais, les armes de l'Empire, inspirées par la Rome antique et Charlemagne, seront reprises sans grandes transformations par le Second Empire. Elles combinent les éléments principaux suivants : L’aigle impériale qui marie habilement les empires romains et carolingien. L’abeille maçonnique et la Légion d'honneur dessinée par le maçon David qui emprunte sa dénomination à la Rome antique.

Avec le sacre de Napoléon 1er, la franc-maçonnerie c’est donné un pontife antéchrist qui s’est élevé en gloire au niveau des empereurs romains. Ce pontife aura ses adeptes qui communieront fraternellement dans les loges. Mais ces temples de quartier ne sauraient exprimer de manière parfaite ce qu’est le maçonnisme dans son cheminement initiatique. La maçonnerie lors du rite d’initiation au premier grade invite l’apprenti à dégrossir la pierre. L’apprenti tape alors par trois fois sur un burin à l’aide d’un marteau. Tout au long des rites et étapes de la vie de maçon, l’architecture, le symbolisme vont avoir une grande importance. A un tel point que parfois les francs-maçons deviennent maçons et bâtisseurs. L’œuvre architecturale devient alors le prolongement naturel d’une expression spirituelle et l’expression d’une foi.

Des grands prêtres de l’expression maçonnique, vont accompagner leur pontife dans l’élaboration d’une véritable capitale d’un nouvel empire maçonnique qui doit éclipser la Rome millénaire. De nombreux monuments devront alors s’élever dans la capitale pour faire le lien avec la Rome antique, comme la colonne Trajane de la place Vendôme. Napoléon 1erconfie aux architectes francs-maçons, Charles Percier et Pierre-François Fontaine, la mission de préparer les plans d'une cité impériale dont le centre eut été le Palais du Roi de Rome édifié sur la colline de Chaillot, mais que la chute de l'empire empêchera de réaliser. Néanmoins le grand temple de la culture cher au pontife verra le jour sous la forme du musée Napoléon.


En 1800, Napoléon Bonaparte décide de chasser du palais du Louvre tous les marchands (du temple) qui occupent les passages. Dès le Consulat, le 9 novembre 1802, le Louvre prend le nom de musée Napoléon. À partir de Napoléon Ier jusqu'à Napoléon III, hormis la période de la Deuxième République, le musée fait partie de la liste civile du souverain. Le musée devient le prolongement architectural de la spiritualité maçonne du pontife maçon. Charles Percier et Pierre-François Fontaine vont retailler en bon maçon, la ville autour du temple maçonnique napoléonien. Ils redessinent les façades de la rue de Rivoli, réaménagent le Louvre et travaillent à le réunir aux Tuileries. En aboutissement de la perspective des Champs-Élysées, Percier et Fontaine dessinèrent l'arc du Carrousel, en commémoration de la bataille d'Austerlitz et qui sera complété par l’arc de triomphe de l’Etoile. Une gigantesque allée processionnelle à la gloire de l’empereur et de ses armées se dessine au cœur de la ville.

Dominique Vivant Denon membre des Sophisiens, loge "La Parfaite Réunion", compta parmi les érudits qui accompagnèrent Bonaparte pendant son expédition égyptienne. Il est chargé par Napoléon d'organiser des expéditions en Europe pour repérer et réquisitionner des objets d'art, qui sont ensuite envoyés au Louvre, pour en faire le plus grand musée du monde. Il ne s’agira en fait que d’un pillage en règle organisé par les maçons français. La fin de l’Empire stoppera le rêve du tyran, mais l’expression de dépit de Denon en dit long sur le fond du projet : « Des circonstances inouïes avaient élevé un monument immense ; des circonstances non moins extraordinaires viennent de le renverser. Il avait fallu vaincre l'Europe pour former ce trophée ; il a fallu que l'Europe se rassemblât pour le détruire. Le temps répare les maux de la guerre, des nations éparses se recomposent ; mais une telle réunion, cette comparaison des efforts de l'esprit humain dans tous les siècles, cette chambre ardente où le talent était sans cesse jugé par le talent, cette lumière enfin qui jaillissait perpétuellement du frottement de tous les mérites vient de s'éteindre, et de s'éteindre sans retour. »

Pour les francs-maçons, la maçonnerie appartient aux "sociétés" fondées sur une initiation à un ésotérisme, c'est-à-dire une vision du monde réservée à des individus qui ont accompli un cheminement spirituel. Chez, les chrétiens ils appellent ça l'hermétisme ou la théosophie, chez les musulmans le soufisme et chez les juifs la Kabbale. Ainsi ce qui est considéré comme une grave dérive occulte dans les religions, devient ouverture d’esprit plus large aux choses de l’esprit chez les francs-maçons. Ainsi ils prétendent ne pas être une religion en soi, mais néanmoins ils sont frères, les loges ne sont que réunions d’hommes éclairés, mais sont néanmoins appelées temples. Le Louvre n’est qu’un musée, mais recèle tous les trésors réunis de toutes les croyances humaines voulues par un pontife maçon. Dans le maçonnisme tout est spirituel et renvoie indubitablement vers une conscience maçonne commune qui s’inspire d’un puissant courant antéchrist dont ils nient l’origine et qui pourtant fut porteur de leur foi chrétienne initiale. Ainsi, comme un esprit démoniaque peut au travers de la kabbale pervertir le judaïsme, le maçonnisme est l’expression perverse d’un démon qui avilit les religions, mais en même temps déshumanise les humanistes et abrutit les philosophes.  

Les francs-maçons napoléoniens se disent frères, mais se désolidarisent du genre humain qu’ils corrompent et avilissent. Qu’ont fait ces gens de bien pour les ouvriers après la Révolution ? Rien, si ce n’est d’interdire les grèves et les syndicats, ou développer l’instruction qu’à partir des études supérieures réservées aux plus riches. Ils rétabliront l’esclavage et créeront des bagnes pour les enfants. Préserveront le vote censitaire, pour au final mettre un dictateur au pouvoir. N’hésitant à aucun moment d’envoyer la troupe pour mater dans la violence et le sang toute opposition. Oui, vraiment, la franc-maçonnerie a agi comme un cancer non seulement pour détruire les principes chrétiens, mais dans un sens plus large l’esprit même des Lumières qu’ils ont perverti.

Napoléon a cru s’élever au niveau des plus grands empereurs. Mais cependant son empire comme le Seigneur le décréta ne dura qu’un peu de temps. Car Napoléon était un instrument entre les mains de Dieu pour juger la grande prostituée et remodeler politiquement l’Europe entière. Pour les francs-maçons qui aiment à étudier le symbole, qu’ils méditent sur la chute de leur empereur. L’Empire ne parvint pas à faire chuter l’Angleterre en plein réveil méthodiste et sa maîtrise des mers ne sera jamais contestée. Et c’est encore par elle que le Seigneur va s’imposer sur le continent par un homme qui va symboliser cette victoire sur l’Empire.


Arthur Wellesley duc de Wellington est principalement connu en tant que vainqueur de Napoléon à Waterloo. Il va reconquérir la péninsule ibérique. Promu maréchal, Wellington conduit une nouvelle offensive en 1813, culminant à la bataille de Vitoria, nette victoire britannique qui ramène l'armée impériale en France. Il envahit la France et se heurte au maréchal Soult qui dirige la défense de Toulouse le 10 avril 1814. L'issue de cette bataille marque la fin de la campagne de 1814. Le 11, Napoléon signe le Traité de Fontainebleau, conclu le 6, et est exilé à l’île d’Elbe. Le 26 février 1815, Napoléon quitte son exil à Elbe. Débarque en France le premier mars et le vingt retrouve le contrôle du pays. Il doit alors faire face à la formation à nouveau d'une dernière coalition contre lui. Deux jours plus tard, le 18 juin, Wellington, avec l’appui des forces prussiennes commandées par Gebhard Leberecht von Blücher bat définitivement Napoléon à la bataille de Waterloo. L’Empereur français abdique une nouvelle fois le 22 juin, et est exilé par les Britanniques sur l’île Sainte-Hélène.

Le nom initial du vainqueur de Napoléon est Arthur Wesley… Qui renvoie directement au mouvement de réveil méthodiste anglais de John Wesley. La ruche maçonnique qui symbolise leur temple, vient d’être anéantie par un Esprit supérieur qui Lui construit le véritable Temple du Saint Esprit au travers de l’Epouse du Christ. Le mouvement se poursuivra en Amérique au travers des esclaves noirs qui par leurs prières incessantes briseront définitivement les chaines de l’esclavage et permettra au puissant mouvement de réveil pentecôtiste de se répandre dans le monde. Ainsi beaucoup de guerres, d’élévations et d’abaissements d’empires, ne sont que le reflet terrestre d’un combat spirituel qui ne se voit pas.

Mais il est un autre aspect des choses qu’il faut aborder, c’est la totale disparité des courants maçonniques qui prévalaient en ce temps-là et qui manifestaient souvent leur antagonisme dans des conflits sanglants. Il y avait des francs-maçons chez les royalistes, les Jacobins ou les Montagnards, qui se détestaient et s’entretuaient sans vergogne, dans un bel élan fraternel n’est-ce pas ?  Mais la même chose existait de part et d’autre de la Manche. Cette dualité saute aux yeux pendant la Guerre d'Espagne, surtout au niveau le plus haut de la hiérarchie militaire, car le général Wellington et Joseph Bonaparte étaient tous deux francs-maçons, mais prendra une dimension supérieure à Waterloo, où le pontife maçon français va affronter une coalition de maçons européens.

La bataille de Mont-Saint-Jean (la Saint-Jean est une des plus grandes fêtes maçonnes), dite de Waterloo, voit la fin du Premier Empire et de la grande époque des loges militaires. Les unités commandées par les frères Michel Ney (initié en 1801 à la loge "Saint Jean de Jérusalem" de Nancy, puis membre de la loge militaire "La Candeur", du 6ème Corps de la Grande-Armée), Pierre Cambronne et Emmanuel de Grouchy (loges "L'Héroïsme" à Beauvais et "La Candeur" à Strasbourg) sont vaincues par celles dirigées par les frères Arthur Wellesley de Wellington ("Wellesley Family Lodge n° 494", Trim, Irlande) et Gebhard Leberecht von Blücher (loge "Archimedes", Altenburg). Si la plupart des maréchaux d'Empire étaient maçons, nombre de leurs adversaires l'étaient donc également. Mais la franc-maçonnerie anglaise donnait la primauté aux aspects initiatiques et de bienfaisance, les francs-maçons français mettaient l'accent sur la dimension idéologique, et cette maçonnerie bonapartiste avait à son tour un caractère dual, puisqu'elle était à la fois révolutionnaire dans ses manifestations et impériale par son culte de Napoléon, croyante lors de ses adjurations au Grand Architecte de l'Univers et farouchement critique à l'égard de l'Eglise.

Nous pouvons affirmer que la franc-maçonnerie que Napoléon créa et contrôla n'a jamais été égalée en France, tant par le nombre de Loges que par celui des membres. La franc-maçonnerie bonapartiste a servi aussi bien à la promotion de l'Empire et du culte de l'Empereur qu'à la diffusion des idées de la Révolution. La maçonnerie, écrivent Faucher et Ricker, est devenue le soutien fidèle et dévoué du pouvoir, le lieu de rencontre des notables et des membres de la bonne société. Mais on peut dite, ajoutent-ils, que la journée du 18 juin 1815  à Waterloo qui a vu mourir d'un coup plus de francs-maçons qu'aucune autre, est aussi la fin, non seulement de l'Empire, mais encore de la franc-maçonnerie bonapartiste. Ainsi la septième tête de la bête aura tenu que peu de temps, comme le Seigneur l’avait annoncé.

Mais on voit également que le maçonnisme ne subsiste que s’il est lié à un esprit souverain plus fort auquel il est attaché et directement dépendant. Si on le coupe de cette base nourricière, il meurt. Il en est ainsi du christianisme ou des Lumières, où les francs-maçons se développent non en tant que matière, mais en tant que cancer. Cela se vérifiera plus tard dans la sphère anglo-saxonne et en France où ils évolueront et divergeront profondément, tout en corrompant les Etats qu’ils infecteront de leur esprit occulte.  

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