Il y a trois rites de passages dans la franc-maçonnerie.
Le premier est la cérémonie d’initiation : le passage du profane, celui qui
n’est pas franc-maçon, au statut d’apprenti, après l’entrée dans la
franc-maçonnerie, il existe deux autres cérémonies : celle de réception pour
devenir compagnon et ensuite la cérémonie d’élévation pour devenir maître.
La cérémonie d’initiation confère au candidat le degré
d’apprenti, premier degré commun à tous les rites et toutes les obédiences. Le
profane, dont la candidature a été remise et acceptée est, avant son
initiation, introduit dans le Cabinet de Réflexion. Le candidat ainsi isolé au
milieu des objets qui lui rappellent la mort comme des ossements, il meurt en
quelque sorte à son ancienne vie, et se prépare à une vie nouvelle. Jean-Pierre
Bayard (un franc-maçon) donne une excellente définition de ce qu'est
l'initiation maçonnique: L'initiation confère une influence
spirituelle... Le rite d'initiation est un acte magique… étape de la seconde naissance.
Le maçon se trouve en liaison avec les forces cosmiques; plus exactement les
initiés forment avec l'entité cosmique un égrégore. Quand un maçon
parle d’entité cosmique, il faut comprendre force occulte. La parodie du
christianisme est évidente. Un maçon "chrétien" pourrait affirmer
être "né de nouveau" mais il ne fera pas allusion à l'expérience
décrite dans l'évangile. L'esprit reçu lors de l'initiation n'est bien sûr pas
le même... En fait un maçon cesse d’être chrétien, pour peu qu’il l’ait été,
car j’en ai connu hélas. Il faut toujours rappeler qu’après le baptême, qui
représente la mort et la résurrection en Christ, vient l’imposition des mains
qui confère l’Esprit Saint. Les deux étapes vont de pair dans le vrai
christianisme et évidemment également dans le maçonnisme où un esprit diabolique
s’empare alors du maçon.
Lors de l'initiation du second degré (celui de
"compagnon") l'initié découvre la "gloire": elle consiste
au dévoilement de l'emblème maçonnique qui est une étoile à 5 branches (pentagramme)
avec la lettre "G" au milieu. Lors de l'initiation du troisième degré
(celui de "maître") l'initié doit participer dans le temple à une
mise en scène macabre tournant autour d'un personnage légendaire:
"Hiram". Il est question de l'assassinat d'Hiram, de la découverte de
son cadavre décomposé et de la résurrection de ce cadavre. L'initié doit
accomplir huit voyages rituels avant de prendre place dans un cercueil.
C'est le "Vénérable" qui le "ressuscite symboliquement": il
est alors considéré comme une réincarnation d'Hiram.
Ainsi le voyage initiatique du franc-maçon le conduit des
ossements au cercueil, symboles où la mort est omniprésente. C’est du satanisme
à l’état pur. C’est une voie de substitution au christianisme, qui a pour but
de remplacer la religion catholique symbole de l’âge des ténèbres, par la
religion maçonne représentant les Lumières. C’est également le faire entrer
dans une ère nouvelle, où le royaume est remplacé par la République frappée par
la célèbre maxime « Liberté, Egalité, Fraternité ». Pour le
franc-maçon, cette devise possède une force symbolique intrinsèque dont il
prend la mesure lorsqu’il la prononce en loge après l’acclamation écossaise. La
fraternité maçonne exprimée dans la République, revient à établir une
gouvernance de facto par les autorités occultes que Paul appellerait les
princes de ce monde.
Ces choses sont le minimum qu’il faut savoir pour
comprendre comment les francs-maçons utilisent la Ville-Lumière comme support
de leur dogme.
Dans l’étude sur les cathédrales nous apprenons que le
catholicisme cherche à se substituer au christianisme, en reprenant toutes les composantes bibliques
du salut et de l’établissement d’un royaume messianique dont la finalité est
l’avènement de la Jérusalem céleste. Mais avec toutes les valeurs inversées,
puisque le Roi du Ciel est remplacé par la Reine du Ciel et l’Epouse terrestre est
représentée par le pape. La cathédrale inscrivant dans la pierre le principe, les
francs-maçons vont le reprendre en l’accommodant à leur sauce. L’idée étant
cette fois de carrément remplacer la religion par la laïcité élevée en dogme
cachant le fait religieux maçonnique. On
va donc suivre les étapes de la substitution qui s’effectue en trois phases,
comme les trois principaux niveaux maçonniques, l’apprenti, le compagnon et le
maître.
Dans une cathédrale il y aussi trois niveaux qui se
développent sur deux axes. L’axe solaire d’est en ouest qui révèle le parvis,
la nef et le cœur. Et un axe vertical qui part de la crypte, la nef et les
vitraux. Les francs-maçons vont donc
reprendre tout ça, pour construire leur propre temple sur le même modèle, mais en
plus grand, comme avec la tour Effel par rapport au Sacré-Cœur.
La première étape est la crypte qui rassemble les
reliques. C’est en fait une tombe sur laquelle l’édifice repose. La pyramide du
Louvre joue aujourd’hui ce rôle, cette antique tombe des pharaons permet
subtilement d’enterrer symboliquement sous elle, tous les symboles religieux
depuis les Sumériens jusqu’à nos jours dans le musée du Louvre. Puis de l’axe vertical,
on se déplace horizontalement en suivant l’axe solaire en passant par trois
portes qui symbolisent les trois étapes de la construction de l’édifice. C’est
en prenant de la hauteur qu’on peut le mieux « lire » le dogme
architectural. Mais nous sommes ici dans une structure aboutie qui s’est
construite en plusieurs étapes, générations et régimes politiques. Les
fondements c’est Napoléon Bonaparte qui les posa, puis d’autres poursuivirent
l’œuvre jusqu’à aujourd’hui.
Le Louvre ce sont les rois de France qui commencèrent sa
construction en la poursuivant sur plusieurs siècles. Mais c’est les
francs-maçons qui l’achevèrent avec la pyramide. Ils l’ont donc finalisé selon
leur vision des choses, mais l’échelonnant également sur plusieurs siècles et
étapes. D’une certaine manière, les maçons achèvent l’œuvre des rois de France
successeurs des rois d’Israël selon le vœu catholique, en les substituant par
des chefs issus de leurs rangs. Ce sera particulièrement remarquable sous les
deux empires napoléoniens.
Vu de haut, le Louvre par ses proportions ressemble
étrangement au temple de Salomon, mais orienté à l’inverse. Le Temple de
Jérusalem, répond lui-même au tabernacle qui est le modèle original. Le
tabernacle construit par Moïse avait été fait d'après un modèle très spécifique.
Le Seigneur lui avait dit en effet: “Vous ferez le tabernacle et tous ses
ustensiles d'après le modèle que je vais te montrer.” L'ordre est répété en ces
termes: “Regarde et fais d'après le modèle qui t'est montré sur la montagne.” Exode 25:9, 40. Ces dimensions sont 2/3 pour le lieu
Saint et 1/3 pour le lieu Très Saint qui forme un cube parfait.
Dans cette parodie templière, nous retrouvons un parvis
avec le jardin des Tuileries et son entrée par l’arc de triomphe du Carrousel. Puis la cour Napoléon qui fait 2 fois la
suivante. Cela devient encore plus évident quand on connait la dimension de la
Cour Carrée qui fait 112 m et pourrait comme un écrin, recevoir en son sein la
Grande Arche cubique qui fait 110m de côté. Le temple serait donc la première
étape qui mène vers le ciel et la lumière et ils le reproduisent selon le
modèle des cathédrales, mais en plus grand et surtout immensément plus beau et riche,
puisque le Louvre est le plus grand musée du monde, contenant des œuvres inestimables.
Le temple physique est également la représentation spirituelle
du temple mystique qui représente le peuple élu lui-même. Et ce peuple se doit
de vivre et marcher dans la lumière de l’instruction, pour élever son âme afin de
construire dans le ciel cette Jérusalem céleste promise à tous ceux qui
marchent dans la lumière. Le musée du Louvre est donc l’expression mystique de
ce que l’apprenti dans les loges découvre, soit comment ouvrir son esprit tel un
compas fermé qui s’ouvre progressivement à la connaissance. Le musée agit alors
comme la bibliothèque de pierre que représente une cathédrale. C’est apprendre
à faire parler les pierres dans leurs symboles, ce qui est la base même du maçonnisme,
acquérir les outils mystiques pour construire le temple mystique. Le Conseil
international des musées (ICOM) a élaboré une définition précise qui fait
référence dans la communauté internationale pour définir ce qu’est un
musée: « Un musée est une institution permanente sans but lucratif au
service de la société et de son développement ouverte au public, qui acquiert,
conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine matériel et immatériel de
l’humanité et de son environnement à des fins d'études, d'éducation et de
délectation. » Le dogme maçonnique ne pourrait être mieux résumé si on le ramène au domaine de l'esprit.
L’œuvre maçonnique
de Napoléon Bonaparte
Un peu d’Histoire est nécessaire pour comprendre comment
on est arrivé à transformer le Louvre en temple. Durant la Révolution la
plupart des loges maçonniques se mettent en sommeil. Le réveil n'aura lieu
qu'avec le Directoire et surtout l'Empire. Seules quelques dizaines d'entre
elles sont encore en activité après la Terreur. Avec l’ascension de Napoléon, le
maçonnisme va renaitre de ses cendres et croître de plus belle. Mais attention,
contrairement au catholicisme qui par syncrétisme est parvenu au dogme marial,
le maçonnisme n’est pas un bloc homogène suivant un seul courant de pensée. Divers
courants se sont créés au fil du temps et se mélangent entre eux dans les
symboles selon les circonstances et les époques, Napoléon cherchant surtout à
en garder le contrôle général.
Les symboles égyptiens, présents dans certains rites sous
l'influence de l'Italien Cagliostro au XVIIIe siècle, se sont, quant à eux,
répandus sous l'Empire, après l'expédition militaire de Napoléon Bonaparte de
1799, qui a déclenché une véritable égyptomanie. Tandis que les loges
prospéraient sous la haute surveillance de Joseph Bonaparte, de Jean-Jacques
Régis de Cambacérès et des principaux maréchaux d'Empire, le culte de la
civilisation égyptienne nourrissait les arts, l'iconographie et l'architecture.
«On a vu apparaître des déesses et des pyramides un peu partout», explique
Raphaël Aurillac, initié à la Grande Loge nationale française et auteur du
Guide du Paris maçonnique (Éd.Dervy) . Des officiers napoléoniens ont
d'ailleurs fondé au Caire une loge, Les Disciples de Memphis. L'un de ses
membres, de retour en France, a poursuivi cette lignée égyptienne en 1815 avec
la naissance du rite de Memphis, qui a fusionné ensuite avec un autre rite,
celui de Misraïm, issu de traditions ésotériques. Ce qui démontre que le maçonnisme
n’hérite pas d’un courant religieux passé tutélaire commun aux différentes
loges, mais se créé au fil du temps et des obsessions mystiques qui portent
vers les cultes à mystères.
Ainsi, quasiment exclusivement entouré de francs-maçons
connus, Napoléon initié en Égypte et secondé de Jean-Jacques, Régis Cambacérès, va donner
aux frères les rênes du pouvoir en France. Cambacérès Archichancelier
de l'Empire en 1804, participa à la rédaction du Code Civil. Grand
Maître-adjoint du Grand Orient de France de 1806 à 1815, comme suppléant du roi
Joseph Bonaparte. Napoléon lui assigna la mission de "surveiller et
contrôler" la maçonnerie. Plus de 1200 loges furent constituées sous son
mandat. Napoléon voulut aussi l'unité de la maçonnerie. A peine le Suprême
Conseil de France (avec le rite Ecossais Ancien & Accepté) nait-il en 1804
que Napoléon impose un 1805 un Concordat et une alliance avec le Grand Orient
de France (avec le rite Français). La plupart des hauts dignitaires du Régime
impérial furent francs-maçons, à commencer par les frères de l'Empereur (à
noter que le père de l'Empereur fut également franc-maçon).
Au Louvre, Napoléon
entreprit de grands travaux, car il voulut faire de l’ancienne demeure des rois
de France un sanctuaire incomparable, réunissant les trésors dispersés aux
quatre coins de l’Empire, et la vitrine artistique de son règne. Modernisé,
aménagé, organisé en galerie de toutes les gloires de l’Europe antique et
moderne, le palais fit l’objet des soins des plus grands artistes du temps.
Dans son prolongement il débuta l’arc de triomphe de l’Étoile en 1806. Les décorations
maçonniques sur les façades du Louvre et la symbolique des portes masquées en arc
de triomphe, révèle une seconde volonté plus ésotérique qui lie entre eux
différents monuments construits sous sa direction. Surtout si on y adjoint le
Parlement entre les deux. Car c’est sous Napoléon que l'on décide de dissimuler
la salle des séances ajoutée au Palais-Bourbon pour accueillir le Conseil des
Cinq-Cents puis le Corps législatif et répondre symétriquement au Temple de la
Gloire maçonnique par un nouveau péristyle. Ainsi tout un ensemble aligné comme
un fil à plomb se met progressivement en place dans la capitale.
A la fin du Premier
Empire, le temple et ses symboles associés sont définitivement en place sur
trois niveaux, selon les trois grades maçonniques. Le Louvre, le Parlement et le
Temple de la Gloire maçonnique, puis pour finir l’Arc de Triomphe de l’Etoile. Pour
le Paris du XIXème c’est déjà énorme, mais plus tard ils iront encore plus loin,
mais nous verrons cela plus tard. Ainsi en partant du temple/Louvre et en passant
par les portes subjectives de l’arc de triomphe du Carrousel, datant de 1809, jusqu’à
celui de l’Etoile commencé sous son règne, on comprend que symboliquement on
passe du temple terrestre au ciel, ou des Frères du temple au Grand Architecte.
Là encore on retrouve le nom de Babylone, la porte des dieux, ou le passage
pour accéder au divin. C’est encore plus remarquable quand on retrouve une
allégorie de la Reine du Ciel sur l’arc de triomphe du Carrousel qui est
particulièrement symbolique.
L’arc de triomphe
du Carrousel célèbre la victoire de l'armée française à Austerlitz. Le
quadrige surmontant l'arc est une copie des Chevaux de Bronze de Constantin
Ier, attelage ornant le dessus de la porte principale de la basilique Saint-Marc
de Venise. En effet, à l'issue de la première campagne d'Italie, l'armée
française menée par le général de l'armée d'Italie Napoléon Bonaparte rapporta
de Venise en 1798, l'original de la sculpture comme « trésor de
guerre » et la plaça sur le monument. Mais pourquoi justement prendre le
symbole de victoire de Constantin ?
Car Constantin serait le premier empereur romain à se
convertir au christianisme, puis aurait par une donation fait don de son Empire
aux papes catholiques. C’est évidemment
totalement mensonger, mais les papes soutiennent le contraire et c’est cela qui
compte. Charlemagne sacré empereur à Rome par le pape Léon III le
25 décembre 800, relèvera une dignité disparue depuis l'an 476 en
Occident. C’est une forme de résurrection du Saint-Empire romain. L'Église
affirme alors qu'elle doit donner la légitimité du pouvoir par le rituel du
sacre. Le modèle est l'onction que reçut le roi David par Samuel dans l'Ancien
Testament. Au travers de l’Empereur c’est en fait l’Eglise qui gouverne, puisqu’elle
seule à le pouvoir du sacre. Le Saint-Empire germanique est ce qui restera à
terme de ce mariage entre l’Eglise et l’Empire.
Le 2 décembre 1805, l’Autriche, qui, sur l’instigation de
l’Angleterre, soucieuse de desserrer l’étau qui la menaçait de l’autre côté de
la Manche, avait, en compagnie de la Russie du tsar Alexandre 1er, déclaré la
guerre à la France napoléonienne, subissait, avec sa complice, une défaite
exemplaire et cuisante à Austerlitz. Mais cette défaite n’avait pas eu de
conséquences que pour l’Autriche et la Russie. En effet, depuis des siècles,
les petits princes allemands, trop faibles pour se défendre seuls contre les
grands prédateurs voisins, vivaient dans l’ombre et sous l’aile protectrice du Saint-Empire
romain germanique, sur lequel régnait, en théorie, l’empereur d’Autriche. Après
la défaite autrichienne, les princes allemands se regroupent dans une
Confédération. Ce faisant les princes allemands établissaient l’acte officiel
de décès du Saint-Empire, décès constaté et avalisé, le 6 août 1806, par
l’empereur d’Autriche, François II. Celui-ci renonçait à son titre d’empereur
d’Allemagne pour prendre celui d’empereur d’Autriche sous le nom de François
1er, empereur héréditaire d’Autriche. Ainsi ce qui restait encore en Europe du Saint-Empire
romain établi par Constantin disparaissait définitivement. Quelle victoire
spirituelle pour le Maçonnisme contre le Catholicisme, qui se voulait héritière
de Constantin.
C’est cette victoire symbolique que l’on retrouve sur un
bas-relief de l’arc du Carrousel. "La paix de Presbourg". Il montre
avec précision, de la pointe du bâton de pouvoir que tient le personnage
principal, le début du signe du Sagittaire, c'est-à-dire les premiers jours de
décembre. Le zodiaque est ici utilisé à titre de calendrier, montrant la date
du traité ainsi que la date du couronnement qui fut célébré un an plus
tôt. La manière dont le sacre fut effectué devrait enlever tous les doutes
sur les intentions réelles de Napoléon. Afin de montrer sa puissance, Napoléon
ne va pas se faire sacrer à Rome, comme autrefois Charlemagne et les empereurs
germaniques (jusqu'au XVe siècle) ;
c'est le pape que l’on fera venir à Paris. Au-delà de la valeur morale qu’a pu
avoir un sacre religieux aux yeux des catholiques, de la valeur symbolique d’un
couronnement pontifical rappelant le sacre des empereurs germaniques, Napoléon
se place au-dessus des rois européens comme successeur de Charlemagne et des
empereurs de la Rome antique. La présence du pape au sacre donne juste une
légitimité à l’Empire. Celui-ci n’est plus simplement le fruit d’une
révolution, c’est un couronnement divin comme celui des autres souverains européens,
mais qu’aucun d’eux ne peut égaler. Napoléon se place au même niveau que le
souverain du Saint-Empire romain germanique avant de le dépasser pour devenir
l'unique empereur en Europe.
Le tableau du ‘Sacre de Napoléon’ donne encore
quelques détails supplémentaires. La scène se déroule le 2 décembre 1804, dans
la cathédrale Notre-Dame de Paris. Or les sacres des rois de France avaient
lieu habituellement à la cathédrale de Reims. Au moment où le pape allait
prendre la couronne, dite de Charlemagne, sur l'autel, Napoléon la saisit et se
la mit sur la tête. Joséphine reçut de lui la couronne et fut sacrée
solennellement impératrice des Français, alors que le pape Pie VII, assis à
droite, tend la main en signe de bénédiction. Napoléon prend ici ses distances
avec le protocole monarchique et veut rompre avec l'héritage Bourbon.
Néanmoins, les différents objets rappellent les regalia royales : couronne
et sceptre sont présents. L'empereur est sacré et devient un monarque de droit
divin auquel on doit obéissance au nom de Dieu comme l'exige le Catéchisme
impérial imposé par décret impérial du 4 avril 1806 dans toutes les églises de
l'Empire. La messe est dite pour le catholicisme et le maçonnisme règne enfin
au travers de l’empereur. Napoléon, d’ailleurs peu sensible au sort du pape, le
retient plus tard prisonnier à Fontainebleau.
Autre symbole remarquable sur l’arc du Carrousel, c’est la
figure centrale, une femme puissante couronnée. La comparaison avec la Vierge
placée au centre de la rosace de la Cathédrale Notre Dame de Paris est
évidente. Elle y siège en Reine du Ciel associée au zodiaque. Image symbolique
qui renvoie aux animaux de l’Apocalypse qui entourent le trône divin. Ainsi la
Vierge remplace Dieu. Ce que la nouvelle reine gravée dans l’arc du Carrousel annonce,
n’est rien d’autre que la victoire du maçonnisme personnifié par cette nouvelle
reine qui détrône celle de la cathédrale. Mais elle annonce aussi l’ouverture
vers une voie spirituelle nouvelle, qu’ouvrent les francs-maçons au travers de
l’arc de triomphe qui joue ici le rôle d’une porte. Ainsi, comme dans le
catholicisme, Satan caché derrière cette autre forme de Reine du Ciel, montre
qui règne vraiment sur les hommes.
L’arc de triomphe du Carrousel serait le pendant du
portail de la Vierge de la cathédrale Notre Dame de Paris, une porte qui ouvre
le passage vers le ciel. Ciel représenté par la rosace symbole par excellence
de la Vierge. Du portail de la Vierge à la rosace, la Vierge est toujours
associée aux signes du Zodiaque, qui représente la maitrise sur le temps et le
destin des hommes. Pour en savoir plus, lisez l’étude sur les cathédrales.
Si on considère l’arc du Carrousel comme le triomphe du maçonnisme
sur le catholicisme, la suite logique se révèle dans les symboles qui
apparaissent sur la place de la Concorde
avec l’érection de l’obélisque. On a déjà vu comme se joue une parodie entre
l’image de la transfiguration et l’association de la loi et de l’esprit, dans
l’alignement, Parlement, obélisque et Madeleine. Mais les francs-maçons vont
aller plus loin dans le symbole. Car cet ensemble monumental est, au point de
vue de l'aménagement urbain, la plus importante création du Siècle des Lumières
dans la capitale.
On comprend aisément que chez les francs-maçons tout est
dans le symbole et que seule une lecture par ce biais permet de saisir le sens
de leur action. Dans ce cadre particulier, la place de la Concorde est
également riche d’enseignements, surtout si on la considère comme la seconde
étape dans les grades maçonniques, celle du compagnon. Elle symbolise le
passage d’une ère à une autre, le temps des monarchies et de l’Eglise à celui de
la République des Frères. Sa dénomination a changé de nombreuses fois,
traduisant l'instabilité des régimes politiques de la France depuis 1789 et une
série d'événements joyeux, tragiques ou glorieux, certains d'une grande portée
historique, qui se sont déroulés sur son sol. Elle s'est appelée place Louis
XV, puis place de la Révolution après le 10 août 1792, place de la Concorde
sous le Directoire, le Consulat et l'Empire, à nouveau place Louis XV puis
place Louis XVI sous la Restauration, place de la Charte en 1830, pour
reprendre enfin sous la Monarchie de Juillet le nom de place de la Concorde. Y placer son symbole solaire, revient à
revendiquer sa victoire spirituelle sur l’adversaire à peine désigné.
Au départ une statue équestre de Louis XV y est inaugurée
le 20 juin 1763 et placée en son centre. Le roi y est vêtu à la romaine, coiffé
d'un catogan et couronné de lauriers. En 1772 la place est achevée et une
enceinte octogonale, pourvue d'une balustrade, bordée de fossés de 20 mètres de large et cantonnée de guérites, est créée
pour ceindre ce vaste espace. Le 11 août
1792 après la Révolution, la statue de Louis XV est renversée de son piédestal
puis envoyée à la fonte. Elle est remplacée par une statue de la Liberté de
François-Frédéric Lemot et la place Louis XV est alors rebaptisée place de la
Révolution. Marquée par le souvenir sanglant de la Terreur et de l'exécution de
la famille royale, la place de la Concorde pose un problème politique aux
gouvernements du XIXe siècle. La statue de la
Liberté ayant été retirée sous le Consulat, et les projets consistants à
édifier une statue de Charlemagne, puis une fontaine, ayant été abandonnés,
c'est finalement Louis XVIII qui envisage de bâtir au centre de la place un
monument à la mémoire de son frère Louis XVI : la statue du roi martyr,
encadrée d'une chapelle et d'un saule pleureur. Charles X pose la première
pierre le 3 mai 1826. La même année, la place de la Concorde est rebaptisée
place Louis XVI (l'inscription était toujours visible à l'angle de la rue
Boissy-d'Anglas jusqu'à récemment). Mais
la statue projetée ne sera jamais élevée, interrompue par la révolution de
juillet 1830, qui redonne à la place son nom définitif de place de la Concorde.
En 1831, le vice-roi d'Égypte, Méhémet Ali, offre à la
France les deux obélisques qui marquent alors l'entrée du Temple de Louxor à Thèbes.
Seul le premier d'entre eux sera transporté vers la France et arrivera à Paris
le 21 décembre 1833. C'est Louis-Philippe Ier qui décide de l'ériger
sur la place de la Concorde où « il ne rappellera aucun évènement
politique », le symbole étant évidemment ailleurs. Entre 1836 et 1846, la
place est transformée par l'architecte Jacques-Ignace Hittorff qui conserve le
principe imaginé par Gabriel. Il ajoute deux fontaines de part et d'autre de
l'obélisque et ceinture la place de lampadaires et de colonnes rostrales. La
place se veut ainsi une célébration du génie naval de la France, en référence à
la présence, dans l'un des deux hôtels édifiés par Gabriel, du ministère de la
Marine. A priori rien de particulier ne distingue donc la nouvelle place de la
Concorde. Mais ce n’est qu’a priori, car d’un point de vu symbolique le
changement est énorme.
La place a été conçue par Ange-Jacques Gabriel en 1755
comme un octogone bordé par les Champs-Élysées et le jardin des Tuileries. Les
fontaines, ajoutées par Hittorff, sont inspirées de celles de la basilique
Saint-Pierre de Rome. On reproduit donc une réplique de la place vaticane ce
qui met immédiatement en relief l’aspect spirituel des deux places. Aspect
souligné deux fois par les octogones de Gabriel et des statues allégoriques de
huit villes françaises qui reprennent le
contour de l'octogone initial imaginé par Gabriel. Mais pourquoi avoir imaginé
une structure octogonale ?
L’octogone en religion
représente deux carrés imbriqués. Cet octogone unit le carré de la terre au
cercle du ciel ; on retrouve ce symbolisme dans de nombreuses cathédrales,
à la croisée du transept, où le carré se transforme en coupole par un octogone.
Le huit assure donc un rôle de médiateur entre les mondes donnant son équilibre
à la manifestation, à l’image de l’homme accompli, liant les mondes. Les
fonds baptismaux des églises, où naît symboliquement l’Homme divin, sont ainsi
construits sur l’octogone. Le principe on le retrouve à Rome dans
l’église mère de toutes les églises, la cathédrale de Latran, siège de l’évêque
de Rome, le pape. Le baptistère du Latran est le baptistère qui a servi de
modèle à tous les baptistères de la chrétienté du Haut Moyen Âge. De plan
octogonal, surmonté d’un dôme, il dépendait de la cathédrale de Rome, à
laquelle il a été relié par une construction tardive. Il est réalisé sous sa
première forme à la demande de Constantin Ier, premier empereur romain chrétien,
aux alentours de 312-313.
L’octogone renvoie donc au fondement de la foi
catholique, à son baptême dans les eaux et à l’Eglise elle-même. C’est encore
plus évident quand on relie les symboles d’eaux entre eux. Les deux fontaines
monumentales symbolisent la Fontaine des Mers et la Fontaine des Fleuves. Outre
les fontaines, la place est entourée de colonnes rostrales qui portent des
proues de navire, qui évoquent également l'emblème de la Ville de Paris. La
place se veut ainsi une célébration du génie naval de la France, en référence à
la présence, dans l'un des deux hôtels édifiés par Gabriel, du ministère de la
Marine sur lequel en levant les yeux on retrouve l’équerre maçonnique.
L’idée
générale devait être étudiée de longue date si on se réfère au blason de Paris
de 1811, avec trois abeilles et la déesse Isis assise à la proue de la nef, car
ici où tout est maçonnique. Symbole qui fut largement utilisé au milieu du XIXe
siècle, il s'agit de la ruche. A l'image de l'abeille, le franc-maçon trouve
toujours le chemin de la lumière, afin de travailler à produire le miel de sa
vie, et à le partager en dehors du temple. Si les Francs-Maçons portent le
titre symbolique d’ « Enfants de la Veuve », c’est en raison d’une tradition
essentielle : celle des mystères d’Isis, la Veuve par excellence, qui parvint à
rassembler les parties dispersées du corps d’Osiris, son époux assassiné et à
le ressusciter. Dame de l’acacia, fondatrice de l’Art royal, Isis apparaît
comme la mère des initiés et des bâtisseurs des temples.
La place de la Concorde affiche dans ses symboles la
volonté maçonnique de se substituer spirituellement à l’Eglise, en offrant une alternative
au pontife romain et sa Reine du Ciel. Dans leur folie sans le savoir il se
place sous la même malédiction et le même jugement que la grande prostituée. Ap
17:1 Puis
un des sept anges qui tenaient les sept coupes vint, et il m’adressa la parole,
en disant : Viens, je te montrerai le jugement de la grande prostituée qui
est assise sur les grandes eaux… Ap 17:15
Et il me dit : Les eaux que tu as vues, sur lesquelles la
prostituée est assise, ce sont des peuples, des foules, des nations, et des
langues… Car dans la Bible les eaux représentent les hommes et la femme la
religion corruptrice, qui se confondent en France dans le maçonnisme et le catholicisme,
l’un essayant de chasser l’autre. Ainsi toute la place de la Concorde se
structure pour révéler à l’initié que le maçonnisme agit comme une religion de remplacement du
christianisme.
L’étape suivante est l’arc
de triomphe de l’Etoile, ou dit autrement la porte de l’Etoile, que les
Babyloniens auraient nommé porte d’Ishtar. Sa construction débute sous
Bonaparte, mais sera achevée trente ans plus tard sous Louis Philippe qui
érigea également l’obélisque. S'inspirant du style antique, chaque pilier est
décoré d'un haut-relief représentant de grandes batailles militaires, qui sont particulièrement
misent en valeur chaque 2 décembre, le jour anniversaire où brilla le soleil d’Austerlitz
qui se lève encore aujourd’hui dans l’axe de l’Arc de Triomphe. Vu du ciel le
pavage dessine d’ailleurs nettement la forme d’un soleil, ce qui accentue bien
la volonté symbolique de le présenter comme un symbole solaire.
Sur l’arc de triomphe de l’Etoile
les symboles se bousculent et comme un mille-feuille se superposent. Comme
dans la Rome antique dont l’Empereur Napoléon reprend les symboles à son
compte, un decumanus qui est une voie orientée d'est en ouest c’est formé du Louvre
à l’arc de triomphe, renvoyant à l’image de la fondation des cités romaines. Comme
si on voulait refonder une nouvelle Rome et sa voie sacrée, cœur de l’Empire. Napoléon
Ier, au lendemain de la bataille d'Austerlitz déclare aux soldats
français : « Vous ne rentrerez dans vos foyers que sous des arcs de
Triomphe » et par un décret impérial en date du 18 février 1806
ordonne la construction de cet arc de triomphe consacré à perpétuer le souvenir
des victoires des armées françaises. Son projet initial était d'en faire le
point de départ d'une avenue triomphale traversant notamment le Louvre et la place
de la Bastille. C’est une reconstitution de la Via Sacra qui voyait le
défilé du général vainqueur et de ses soldats lors de la célébration de leur triomphe,
dont l’arc n’est que le monument qui sert à immortaliser le haut fait militaire
et surtout l’empereur victorieux.
Dans l’arc de l’Etoile, le symbole solaire est
omniprésent. Jusqu’en 1854, cinq voies seulement rayonnaient de cette place.
Napoléon III décida, le 13 août 1854, l’aménagement de la place de l’Etoile
dont la direction fut confiée au Baron Haussmann. En 1857, on ouvrit sept
autres voies. Douze avenues rayonnèrent dès lors d’une façon rigoureusement
géométrique de cette place de 240 mètres de diamètre, convergeant toutes vers
l’Arc de Triomphe, monument qui est à l’origine du développement de tout le
quartier. Entre cette place et cette rue, Hittorf édifia douze hôtels
particuliers d’architecture symétrique, aux façades uniformes. Pour tout
astrologue la symbolique de cette place est plus que clair : nous avons
douze signes zodiacaux qui reconstituent la voute céleste.
La symbolique solaire se retrouve aussi dans l’œuvre
militaire de l’empereur qui se retrouve dans les allégories sculptées sur ses
faces. Louis-Philippe reprit la pensée initiale de Napoléon et avec Adolphe Thiers décide du choix des thèmes et
des sculpteurs. Départ des volontaires de l’An II, 1793 groupe dit « La Marseillaise »,
Paix de Vienne 1810, Résistance de 1814, Paix de 1815. Le déroulement
s’échelonne comme une année solaire déclinant ses saisons en commençant par le
printemps révolutionnaire, puis un soleil au zénith par le triomphe de 1810 et
à la naissance d’une nouvelle dynastie faisant référence à l’Empire romain par
la naissance du roi de Rome, puis l’automne de la Résistance de 1814, le soleil
y décline c’est le début de la chute avant l’hiver et la paix qui scelle la fin
de l’Empire. On pourrait même ajouter que le soleil se couche avec la mort de
l’empereur, faisant de l’homme un quasi-dieu antique. Ainsi l’homme éclairé par
la mystique maçonnique, devient lumière lui-même et même un soleil quand il
accède aux plus hautes sphères du pouvoir. C’est le degré ultime et le plus
haut grade maçonnique qu’on exalte ainsi, celui du maître.
A l’Hôtel des
invalides, la symbolique maçonnique de l’illuminé élevé en gloire tel un
soleil divin va prendre toute sa mesure.
Car là encore un mille-feuille symbolique superpose les symboles afin de bien mettre
en relief la supériorité de l’empereur sur l’Eglise. Les francs-maçons vont
utiliser tout l’édifice comme un livre de lecture à l’image des cathédrales.
Image parfaite, puisque l'église Saint-Louis des Invalides où repose Napoléon,
a été élevée au rang de cathédrale du diocèse catholique aux Armées.
De nouveau un peu d’histoire s’impose. L’hôtel des
Invalides est un monument parisien dont la construction fut ordonnée par Louis
XIV par l'édit royal du 24 février 1670, pour abriter les invalides
de ses armées. Le Roi avait fait construire par les meilleurs architectes du
temps de vastes bâtiments susceptibles de recevoir 3000 pensionnaires compte
tenu des normes de l'hygiène les plus modernes pour l'époque (bains, latrines,
salle aérée). La place d'honneur est réservée à une église sous l'invocation de
saint Louis, roi de France. L'église a été ouverte pour les soldats en 1679.
Ils étaient tenus d'y assister à la messe quotidienne. Dans l'esprit de Louis
XIV, l'Hôtel des Invalides doit non seulement être un hôpital, mais, en outre,
dans une certaine mesure, un monastère.
Le financement de la fondation de l'institution des
Invalides fut assuré notamment par le patrimoine des anciennes léproseries qui
n’avaient plus d’utilité avec la disparition de la lèpre. En vue de parvenir à
cette fin, le ministre de la guerre Louvois recourt à un intermédiaire. Ce sera
l'ordre du Mont Carmel fondé en 1608 par Henri IV et uni à l'ancien ordre de
Saint Lazare de Jérusalem lui-même fondé jadis en Terre-Sainte au service des
lépreux puis rapatriés en France après la chute du royaume latin de Jérusalem.
Conseillé par Louvois, Louis XIV va ranimer cet ordre oublié en lui cédant le
patrimoine des ordres militaires éteints - dont celui du Saint-Sépulcre - ainsi
que celui des " maladreries et léproseries, avec l’ensemble tous les
hôpitaux, Hôtel-Dieu et d'autres lieux pieux" où l'hospitalité n'est plus
assurée (Edit de décembre 1672). Le roi précisait qu'il ordonnait cette cession
considérable de biens pour permettre à lui-même et à ses successeurs d'en
disposer "en faveur des officiers et soldats de nos troupes". Louvois
veille d'autant mieux à l'application de l'édit qu'il se fait nommer dès février
1673, vicaire général de l'ordre de Saint Lazare. Ayant ainsi résolu les
problèmes matériels posés par l'institution des Invalides, le "Roi
très chrétien" se devait aussi d'en régler les spirituels. Le spirituel
étant matérialisé par l’église. Il s’agit alors de créer un édifice où le roi
et ses soldats puissent simultanément entendre la messe tout en y pénétrant par
des accès différents comme l’exige l’étiquette. Hardouin-Mansart imagine une
solution qui associe avec cohérence et harmonie une église royale, dite “Dôme
des Invalides”, et une église des soldats achevée en 1679. C’est dans ce dôme
que Napoléon repose.
Jules Hardouin-Mansart avait prévu de doter l'église des
Invalides d'une colonnade inspirée de celle de la basilique Saint-Pierre de Rome,
mais moins complexe que celle-ci. La colonnade devait être indépendante de
l'église afin de laisser à celle-ci son autonomie monumentale. Elle se serait
appuyée à quatre pavillons, coiffés de petits dômes, qui auraient atteint la
hauteur du socle rectangulaire de l'église. Là aussi on cherche à reproduire la
place de Rome, mais dans un esprit différent de Napoléon avec la place de la
Concorde. Car ici le Roi Soleil devait se représenter comme successeur de
Saint-Louis, le chef de l’armée au service de l’Eglise. Car n’oublions pas que les rois de France
étaient devenus grâce aux artifices mensongers catholiques, la suite logique
des rois d’Israël, mais au sein du nouveau peuple de Dieu représenté par le
monde catholique. C’est d’ailleurs ce
qui est suggéré dans la fresque du Dôme où on retrouve, les Apôtres, Louis IX
(Saint Louis), Jésus-Christ : Saint-Louis remettant son épée à Jésus-Christ
après avoir vaincu les infidèles. Saint-Louis combattit tout ce qui s’opposa à
l’Eglise, les Hérétiques, les Juifs, les Musulmans, ce qui lui valut les
honneurs de la canonisation.
L’église royale, dite “Dôme des Invalides”, représente
donc symbolique le siège de l’autorité royale, et pas n’importe quel roi, le
Roi Soleil Louis XIV. Quand on l’associe à la fresque de Saint-Louis qui voulut
bâtir une nouvelle Jérusalem avec sa Sainte Chapelle, tout le dôme qui
représente le ciel avec ses apôtres, dépeint le roi comme un successeur du
Christ dans la royauté terrestre, un mashiah français en quelque sorte, faisant
du roi un dieu terrestre.
Maintenant si vous tournez votre regard vers le bas, vers
la crypte, vous retrouvez le pendant du dôme, comme son reflet, avec le
sarcophage de Napoléon entouré de douze statues symbolisant ses victoires. La
crypte des cathédrales conservait en général la relique d’un saint, le lieu
sacralise donc Napoléon, le soleil qui entoure le sarcophage renvoie au ciel de
la coupole, ainsi que les 12 victoires reprenant l’idée d’un zodiaque astral
complétant l’image de la voute céleste. D’une certaine manière, les francs-maçons
reprennent au travers des symboles de la tombe de l’empereur, les attributs
royaux pour mieux marquer la passation des pouvoirs régaliens et spirituels sur
le royaume et l’Eglise. Napoléon serait même un achèvement et une apothéose, si
on se réfère au fait que dans son ultime sarcophage, Napoléon est vêtu de
l’uniforme vert des chasseurs de la garde, sa tête est tournée du côté de la
place Vauban, donc orienté au Sud, vers le Soleil à son Zénith.
Image renvoyant
au sarcophage de marbre noir réalisé par le sculpteur Antoine Etex près du
tombeau, où Vauban est représenté à demi-couché. Il tient un compas et médite
sur ses écrits. Il est encadré par les figures de la Science, voilée et de la
Guerre, casquée. Le sarcophage est surmonté d'un obélisque encadré de drapeaux
et d'étendards, où il préfigure les philosophes du Siècle des Lumières. Une
inscription et un bas-relief sur le socle rappellent le projet de dîme royal de
Vauban et valorisent la dimension politique et réformatrice de l'œuvre de
Vauban par rapport à la noblesse, c’est ce que représente le compas maçonnique
de l’ouverture d’esprit. Vauban est ainsi mis à l’honneur par les francs-maçons
qui le considère comme un précurseur du maçonnisme français. Juste en face on
retrouve le tombeau de Turenne également avec son obélisque de marbre noir. Les
deux plus grands maréchaux du Roi Soleil flanqués d’un obélisque, gardant le
sarcophage d’un quasi-pharaon, quel triomphe pour le maçonnisme sur le
catholicisme.
Mais les symboles maçonniques ne s’arrêtent pas là, tout un
code de couleurs entoure le sarcophage de Napoléon en partant du marbre noir de
la base du sarcophage, au blanc des 12 statues, on passe ainsi de la nuit à la
lumière, symbole cher aux maçons, qui enveloppent l’empereur lui-même dans un marbre rouge qui
symbolise le soleil levant. Une autre image biblique du Christ lui-même appelé
l’étoile du matin en 2 Pi 1:19 Et nous tenons pour d’autant plus certaine
la parole prophétique, à laquelle vous faites bien de prêter attention, comme à
une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour vienne à
paraître et que l’étoile du matin se lève dans vos cœurs.
De manière évidente, les francs-maçons cherchent à
remplacer la monarchie et le catholicisme par des valeurs qu’eux même
établissent et remplacent. Aux Invalides Napoléon est vraiment représenté comme
un pharaon qui remplacerait le Christ et un empereur qui supplante les rois. Les
vases contenant le cœur et l’estomac revoient à l’image des vases canopes
égyptiens qui complètent l’image égyptienne du sarcophage. Les symboles que l’on
représente ainsi ont un sens initiatique, car il présente l’empereur comme un
homme ayant atteint les plus hauts degrés maçonniques et brillerait comme un
soleil éternel. Tel un pharaon antique qui en Égypte par son essence divine, sa
conception, sa naissance et son éducation, sa vie entière était la pierre
angulaire d’un système immuable qui tourne comme dans un cadran solaire. Il est
le premier Roi-Dieu qui succède à Horus, le dernier Dieu-Roi ayant laissé le
monde terrestre à son successeur après son envol. Le pharaon est l’hypostase
permanente (représentation ou support physique) de Dieu sur terre. Puisqu’il
est d’essence solaire, on dit qu’il se lève et se couche comme le soleil. Il
est entouré de rites et de symboles qui font de lui un divin authentique. Sa
mort n’a pas la même portée que pour les humains, car, tel le faucon Horus, il
quitte la terre en s’envolant vers le Ciel qui est la demeure de ses ancêtres
divins ou divinisés. Il devient aussi un rayon de soleil qui revient chaque
matin lors du retour cyclique de l’astre à l’horizon oriental. A la lecture des
attributs d’un pharaon, on comprend mieux désormais pourquoi tant de symboles
égyptiens entourent la vie et l’œuvre de l’empereur initié en Égypte. Car il
est l’archétype d’un maçon accompli.
Napoléon n’a pas uniquement posé les fondements du
nouveau temple maçonnique, mais lui également donné un corps d’élus chargés de
diriger la Nation, un temple mystique. Mais la chute de l’empereur va entrainer
celles des maçons. Les premiers mois de la Restauration, vont être pour la
franc-maçonnerie une période noire pour les loges, car Louis XVIII veut
procéder à une épuration des cadres de la nation. La police royale mène des
enquêtes sur les francs-maçons qui ont joué un rôle important pendant la
Révolution et sous l'Empire. De nombreux Frères seront chassés de
l'administration. Pour ne pas disparaître, le Grand-Orient et le Suprême
Conseil de France (nouvelle obédience créée en 1821) vont afficher leur
loyalisme. On saluera leur courage et abnégation pour suivre les principes
qu’ils élèvent en vertu et cela en dit long sur la nature de l’esprit qui les
anime. De plus, suite aux excommunications répétées de l'Église catholique,
devenues applicables en France depuis le Concordat, les catholiques quittent
progressivement les loges, qui, par contrecoup, deviennent de plus en plus anticléricales,
ou dit autrement, laïques.
Louis-Napoléon Bonaparte, le neveu de Napoléon qui était
président de la République depuis 1848 restaure l'Empire en décembre 1852.
Napoléon III, lorsqu'il était encore Louis-Napoléon, fils de la reine Hortense,
avait été initié dans une vendita et avait prêté le serment des carbonari, qui
exigeait un dévouement total, jusqu'à la mort. La Charbonnerie était la cousine
italienne de la franc-maçonnerie, mais elle était nettement plus politisée. Son
but était l'unification de l'Italie. De cette expérience, Napoléon « le petit »
(comme le surnommait Hugo) retint une leçon : il ne faut pas interdire les
sociétés discrètes ou secrètes, car elles se reforment et deviennent
dangereuses. Comme son oncle, Napoléon III contrôle la franc-maçonnerie en
plaçant ses hommes. Il obtient du Grand Orient de France que celui-ci élise le Prince
Murat à la Grande Maîtrise. En 1862, le Grand Orient ayant obtenu que celui-ci
ne se représente pas, Napoléon III décida de nommer lui-même son successeur, en
la personne du Maréchal Magnan qui n'était pas franc-maçon et auquel il fallut
conférer rituellement en toute hâte les 33 degrés de l'écossisme.
Napoléon III créa la Société civile et l'une des
premières décisions sera de signer le 29 mars une circulaire relative à l'érection
d'un temple digne de la Maçonnerie Française. Ce temple sera édifié au 16 rue
Cadet, 1853/1854. Il est aujourd'hui le siège du Grand Orient et du Grand Collège des
Rites. En remodelant la ville de Paris avec ses grands
boulevards et nouveaux bâtiments, Napoléon III va également pouvoir achever
l’œuvre de son illustre oncle, notamment
autour de l’Arc de Triomphe de l’Etoile.
La modernisation de la ville de Paris sera la marque prépondérante du Second
Empire et une période faste pour les Champs-Élysées. On va y construire de
luxueuses demeures pour en faire la plus belle avenue du monde. On créé ainsi
un ensemble cohérent et bien rectiligne au cœur de la capitale, où les
symboles maçonniques seront alignés pour
former un ensemble harmonieux selon les principes des loges. Ainsi le neveu
complètera l’œuvre de son illustre oncle, pour finalement glorifier non pas seulement
l’homme, mais également cette nouvelle religion qui le divinisera, en l’élevant
à un grade qui doit éclipser le Christ en France.
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