http://schoenelblog2.blogspot.com/ Lettre à l'Epouse 2: L’ « esprit » de Noël - 2 -

jeudi 15 décembre 2011

L’ « esprit » de Noël - 2 -

Le principe de la civilisation, a ceci de particulier, c’est qu’il libéra les hommes des contraintes de la nature, souvent jugée hostile. Si on fait abstraction des périodes intermédiaires, les grands empires agissent comme des aires de sécurité et de développement. Les villes deviennent les points centraux où se concentre le développement, économique, artistique, culturel ou religieux.  Ainsi plus les empires deviennent grands et plus les villes suivent dans leur développement. La semence du serpent par Caïn a trouvé dans le principe de civilisation sa pleine mesure, qui consiste en tout premier lieu à éloigner les hommes de Dieu, pour les soumettre à l’emprise de l’adversaire.


Dans un tout premier temps on attribua aux dieux le soin de nourrir, multiplier, d’éduquer et protéger les hommes. C’est ce qui sera la fonction principale des dieux mésopotamiens. Par syncrétisme, c’est au terme d’une longue évolution, que ces fonctions essentielles seront représentées par le couple, Ishtar et Tammuz à Babylone. La reine du ciel associée au berger qui représente le roi sur terre, assoient l’autorité divine sur les hommes. Protégé et se multipliant dans les villes grâce à la reine du ciel et étant nourri grâce à son parèdre masculin qui assure la fertilité aux troupeaux et au sol, une nouvelle voie religieuse va se développer. La voie du salut de l’âme.

Par les phéniciens la culture sémitique va traverser la méditerranée pour conquérir la Grèce et y trouver un nouveau développement. Les dieux qui meurent et ressuscitent pour le bien des hommes dans l’arc sémitique, vont trouver un nouveau départ sur le continent européen. L’agriculture et la fécondité, ne focaliseront plus l’attention principale des peuples, mais sous l’influence grandissante des philosophes grecs, les dieux vont investir le champ de la conscience et de la pensée. C’est dans la pratique des cultes à mystères, que l’intrusion dans les consciences se fera d’une manière toujours poussée.

On distingue les cultes qui dérivent des mythes agraires, attachés au cycle des saisons, de ceux qui visent à relier les âmes humaines au domaine divin. Mais les doctrines intègrent souvent les concepts platoniciens ou mélangent les deux aspects. Un culte ancien est l'Orphisme, dont le héros, Orphée, bien connu par la légende d'Eurydice, serait apparu 1300 ans avant J. C. Fils d'Apollon (ou du roi Œgrus), et de la muse Callipyge, mi-homme, mi-dieu, il serait à l'origine des Mystères d'Eleusis. Á la fois religion initiatique et philosophie, l'Orphisme postule que l'âme humaine réside dans la prison du corps pour expier un crime originel. Elle s'en purifiera, après de nombreuses incarnations, par l'ascétisme et l'initiation spirituelle. Les Orphistes étaient végétariens. L'Orphisme, religion de salut, serait un prélude au Christianisme. Dionysos est aussi un dieu particulier. Fils de Zeus et de Sémélé, qui mourut enceinte en contemplant la gloire du dieu. Zeus porta l'enfant dans sa cuisse jusqu'à sa naissance. Deux fois né, Dionysos est le dieu du vin et de la vie exubérante. Il visita les Enfers, et poursuivi par la jalousie d'Héra, il fut démembré par les Titans avant de devenir immortel. On le célébrait aux fêtes des Dionysies. Il était l'objet d'un Culte à Mystère dont le Cortège Dionysiaque de Satyres et de Ménades, conduit par Silène, aurait déchiré Orphée.

Les Mystères d’Éleusis célébraient le culte de Déméter (l’antique Terre-Mère préhellénique) et de Perséphone ou Coré, la fille qu’elle conçut de Zeus. C'est une déesse agraire qui occupe une place importante dans la religion grecque. Associée à l’abondance, elle est identifiée à Cérès par les Romains. Dans la légende éleusinienne, Hadès, dieu des enfers, enleva la jeune Coré. Brisée de chagrin, Déméter abandonna sa fonction et la Terre devint stérile. Devant le désastre, Zeus chargea Hermès de libérer Coré. Le rusé Hadès offrit à la jeune femme une grenade dont elle mangea un seul grain. Ayant goûté à la nourriture des morts, elle devrait rester aux enfers. Mais Zeus intervint, décidant que Coré Perséphone passera chaque hiver trois mois chez les morts, et reviendra sur la Terre des vivants le reste de l’année. Fécondée par Zeus, Perséphone conçut un fils, Zagréus, dont l’histoire ressemble à celle de Dionysos. Poursuivi par la jalousie de Héra, (ou Junon), Zagréus revêtit plusieurs apparences. Transformé en taureau, il fut dévoré par les Titans mais la déesse Pallas, (Athéna), préserva son cœur. Zeus foudroya les Titans et absorba le cœur de son fils qui, régénéré, devint Iacchos, assimilé à Bacchus, lui-même identifié à Dionysos. Ces mythes conjoints semblent provenir de cultes agraires primitifs associant en syncrétisme les cultes dionysiaques et l’Orphisme.

Les Eleusinies sont les fêtes les plus connues de ce culte antique. Elles auraient été institués à l'instigation de Triptolème, fils de Céréos, qui avait reçu de Déméter la mission de répandre le blé dans le Monde. Célébrées dans le Télestrérion chaque année, elles faisaient participer les fidèles à la résurrection de l’enfant divin revenu de l’empire de la mort. Á Éleusis, avant l'automne, des cérémonies extérieures préparaient la célébration des Mystères. Ces préliminaires ont été bien décrites et nous sont relativement connues. Des reliques mystérieuses, (les hiéra sacrées), étaient transportées en procession jusqu'à Athènes et déposées dans le sanctuaire "Éleusinion". Une excommunication solennelle était prononcée contre les impurs, puis les mystes, (candidats admis), entraient dans la mer pour se purifier. Après quelques jours de retraite et de jeûne, la procession immense des fidèles et des mystes retournait à Éleusis, précédée de l'effigie de Iacchos, des hiéra, et des autorités. Les cérémonies secrètes commençaient dont les rites sont restés mystérieux. La divulgation en était rigoureusement interdite. Les Mystères d'Éleusis étaient extrêmement populaires au-delà même de la Grèce, au point que la salle d'initiation, le Télestrérion, atteignit finalement une surface de 2600 m2. Malgré le nombre immense des fidèles, aucun n'a jamais commis le sacrilège de rompre cet interdit.

Les rites séparaient les initiés, appelés à la vraie vie éternelle, des non-initiés, destinés au bourbier infernal. Après avoir rompu le jeûne, les mystes recevaient une révélation bouleversante : Bienheureux qui a reçu cette vision, avant de descendre sous la terre. Il connaît ce qu’est la fin de la vie. Il sait ce qu’est le principe donné par Zeus. (Pindare, Hymne, vers ~480). L’initiation assurait par elle-même le salut et la future survie personnelle du myste. Définitivement sauvé par cette entremise extérieure, il n’était tenu à aucun comportement moral particulier. En cela, au moins autant que par la foi en une vie future et l'orientation monothéiste héritée de l’Orphisme, les Mystères Éleusiniens préparaient au conflit du Paganisme et du Christianisme. Toutes ces légendes concordent. Dionysos-Bacchus, fils de Zeus et de Perséphone, jalousé par Héra, est tué et dévoré par les Titans primordiaux. Zeus les foudroie. Dionysos ressuscité, nait ainsi deux fois. Les hommes naissent des cendres des Titans avec leur nature animale et matérielle, mais leur âme recèle une parcelle du Dieu dévoré. Et dans la théogonie des Orphistes, six générations divines bouclent sur elles-mêmes. Phanés, (la Lumière originelle), fils de Zeus, est le premier roi des Dieux, suivi de Nuit, d’Ouranos, de Kronos, et de Zeus qui remet enfin son pouvoir au fils, deux fois né, Dionysos, lequel est aussi le retour eschatologique de Phanés, le Lumineux des origines.

Comme on peut le constater, le cheminement de la pensée religieuse a considérablement évolué depuis la Mésopotamie. Le cycle des dieux qui meurent et ressuscitent, tend désormais à assurer un salut à l’âme, bien plus qu’au corps et biens terrestres. Cette évolution nouvelle se développera sur environ 1000 ans, jusqu’à la naissance de Jésus-Christ. Mais l’adversaire va encore procéder à quelques ajustements avant la confrontation finale entre le christianisme et les cultes à mystères.

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