Si on reste factuel, il apparait que le développement
culturel accompagna les réveils religieux. On devrait donc le considérer comme
un fruit de l’Esprit Saint quand on reste dans la lumière du Christ. Il est donc
logique que le Diable cherche à
maintenir les hommes dans l’ignorance et la superstition, car c’est par ce seul
moyen qu’il peut réellement exercer sa gouvernance. Tout le Moyen Age témoigne
dans ce sens. Quand la Réforme protestante fait briller les premiers feux d’une
aube nouvelle, à la fois religieuse et culturelle, le diable comprend qu’un
profond changement s’opère et qu’on approche des temps de la fin et que son
règne sans partage s’achève. L’autorité suprême du pape et de son bras séculier
la monarchie, commencent à vaciller. L’Europe se scinde alors progressivement en deux parties avec un nord
protestant et un sud catholique.
La période de la Renaissance sera la période charnière où
s’opéreront les premiers changements en profondeur en Europe. Mais quand je
pense Renaissance, je n’attribue pas à la Renaissance italienne la paternité du
changement culturel qui touche toutes les strates de la société postmédiévale. Les
changements qu’opèrent la renaissance italienne, bien qu’importants, ne se
produisent que dans les plus hautes couches de la société, et pour la grande
majorité de la population la vie quotidienne reste peu différente de celle au
Moyen Âge, même si l'essor de la bourgeoisie marchande a permis d'élargir
l'accès à la prospérité, ce qui contraste avec la plus triste condition de
l'Europe dans le Haut Moyen Âge.
La Renaissance italienne est, en effet, d'abord un
phénomène économique qui s'amorce, selon certains historiens, dès le XIIe siècle à la suite de la Première Croisade. Les
routes commerciales de l'Orient s'ouvrent aux marchands européens, et l'Italie,
au centre de la Méditerranée, devient la plaque tournante du commerce entre
l'Europe et l'Asie. Les cités marchandes italiennes s'enrichissent grâce au
commerce de la soie et des épices. Un système bancaire moderne se crée et une
nouvelle classe sociale voit le jour : la bourgeoisie. Le développement
artistique qui l’accompagne n’étant que le pendant d’une richesse qui s’accroit
démesurément, mais en aucun cas comme étant l’expression d’une culture plus
générale, le catholicisme interdisant un véritable développement culturel.
Celui-ci viendra de l’Europe du Nord.
Dès le XVIe siècle, la
Réforme protestante conduite par Martin Luther et Jean Calvin secoue l'Europe
tout entière. Le protestantisme porte en lui les germes de ce qui constitue un
« terreau » de valeurs qui révolutionnent la conception du travail et
de la vie. En effet, d'après Max Weber, le travail n'a pas à être considéré
comme le châtiment expiatoire du péché originel comme le rapporte l'éthique
catholique. C'est au contraire une valeur fondamentale au travers de laquelle
chacun s'efforce de se rapprocher de Dieu. Les protestants seront donc beaucoup
plus dynamiques économiquement que les catholiques et développeront leurs
entreprises bien plus rapidement. À la suite de la révocation de l'édit de
Nantes, par l'édit de Fontainebleau de 1685, la France se prive du savoir-faire
et des capitaux des protestants, les huguenots, qui fuient vers les
Provinces-Unies (aujourd'hui les Pays-Bas), les Pays germaniques (Saint-Empire,
Suisse, etc.) et l'Angleterre; c'est-à-dire vers les pays protestants qui
bénéficieront économiquement du savoir-faire des exilés. Le siècle des Lumières
verra donc parallèlement se développer la culture et une nouvelle économie, qui
débouchera en Angleterre sur la révolution industrielle.
La croissance économique, humaine et culturelle était
quasi nulle pendant tout le Moyen Age. Avec le développement exponentiel de la
culture et de l’économie à partir du 18ème siècle, la population mondiale va
commencer à croître pour passer de quelques centaines de millions à plusieurs
milliards au 20ème siècle. On mesure l’influence néfaste du catholicisme sur la
société rien qu’à cette aune. Les papes catholiques si prompts à défendre la famille
ont en fait privé l’humanité de milliards d’individus par le seul fait de leur
influence diabolique. Mais comme si cela ne suffisait pas, ils ont aussi
maintenu dans la servitude, l’ignorance et la pauvreté la plus grande masse des
peuples sur lesquels s’exerçait leur influence. Si on ajoute la malédiction qui
frappa l’Europe à cause des papes, on peut même ajouter que les famines, les
épidémies et les guerres, firent perdre à l’Europe un tiers de ses habitants. On
pourra donc mettre en parallèle la décroissance économique, culturelle et
démographique de 1000 ans de catholicisme au Moyen Age, avec les 500 ans de
croissance qui accompagneront les réveils religieux qui se succèderont depuis
les humanistes et la Réforme du 16ème siècle, jusqu’à aujourd’hui.
On peut d’ailleurs facilement suivre le cheminent de la
croissance économique et celui des grands réveils religieux comme on l’a vu
avec le protestantisme au 16ème siècle. Au 18ème un prédicateur anglais, John
Wesley, partit aux États-Unis pour
prêcher. Lors du voyage de retour, il partageait le bateau avec des
missionnaires moraves, et fut très impressionné par leur foi inébranlable
malgré une tempête. Cela l'aurait conduit à « une rencontre personnelle
avec Dieu », et à son retour en Angleterre il parcourait le pays à cheval
en prêchant l'Évangile, rassemblant des foules en plein air, puisque l'Église
anglicane voyait d'un mauvais œil ses activités. Il fondra les bases du méthodisme.
Le nom « méthodiste » vient du fait que Wesley avait un système ou
une « méthode » de prière et d'étude pour faire grandir chrétiens et
nouveaux convertis dans leur foi. Les « basses » couches de la
société anglaise vont donc connaitre une régénération en profondeur qui va bouleverser
la société dans son ensemble. Une monarchie constitutionnelle sera établie avec
un Parlement qui gouverne et l’essor industriel fera de l’Angleterre une des nations
les plus puissantes du monde au 19ème siècle.
En France les
choses vont se passer tout autrement et la transition vers le monde moderne va
se faire dans la douleur et les larmes. Partagée entre l’influence du
protestantisme du nord et le catholicisme du sud, la fille ainée de l’Eglise va
être déchirée en permanence par des courants religieux et culturels qui
s’opposent violemment. L’influence des rois de France catholiques qui passèrent
par le fil de l’épée tous les hérétiques qui s’opposent au pape, va
progressivement amener le pays à entrer ouvertement en guerre contre Dieu lui-même.
Car on n’extermine pas les enfants de Dieu, sans que cela ne porte à terme à de
funestes conséquences.
L’accession au trône de Louis XIV, le Roi-Soleil, marque
l’hermétisme du clergé et de la noblesse
à toutes les valeurs chrétiennes qui se développent dans le nord de
l’Europe. Il marque l'apogée de la construction séculaire d'un absolutisme de
droit divin. Après une minorité troublée par la révolte de la Fronde
(1648-1653), Louis XIV assume personnellement le gouvernement à la mort du
cardinal Mazarin en 1661 en ne prenant plus de ministre principal. Son autorité
se déploie avec la fin des grandes révoltes nobiliaires, parlementaires,
protestantes et paysannes qui avaient marqué les décennies précédentes. Le
monarque impose l'obéissance à tous les ordres et contrôle les courants
d'opinion y compris littéraires ou religieux (répression des jansénistes et
révocation de l'édit de Nantes en 1685). Louis XIV construit un État
centralisé, où son rôle direct est encore accentué après le décès des ministres
Colbert (1683) et Louvois (1691).
Sa difficile fin de règne est marquée par l'exode des
protestants persécutés, par des revers militaires, par les deux famines de 1693
et de 1709 qui font près de deux millions de morts, par la révolte des camisards
et par de nombreux décès dans la famille royale. La malédiction divine qui le frappe
lui et toute la France au travers de sa personne, ne modifie pas les habitudes
royales, qui vont conduire finalement à leur annihilation avec la Révolution
française. Ce Roi-Soleil fabriqué par les cardinaux français va également
imprimer sa marque en profondeur dans l’économie du pays. A l’image de sa
politique du « pré carré » qui cherche à agrandir et rationaliser les
frontières du pays, protégée par une « ceinture de fer »
(fortification des villes conquises par Vauban), qui favorise le colbertisme.
Le colbertisme
est un principe économique et financier, élaboré par le contrôleur général des
finances de Louis XIV, Jean-Baptiste Colbert, selon lequel la
puissance d'un pays est proportionnelle à ses réserves en métaux précieux,
en or notamment. Pour obtenir de telles
disponibilités, l'Etat doit faire rentrer un maximum d'argent dans ses caisses.
Il y parvient en menant une politique dirigiste et protectionniste afin de
contrôler l'ensemble des activités économiques et plus particulièrement le commerce
extérieur. Le colbertisme, ce n'est pas l’État au service du
citoyen, c'est l'économie au service de l’État, préfigurant le capitalisme
d'Etat et l'économie administrée. Même si une telle doctrine tolère une
certaine liberté du commerce, elle n'est pas d'essence libérale, car par la
puissance économique du pays on cherche à renforcer celle du roi et de l’Eglise
qui absorbe la plus grande partie des richesses créées. On maintient ainsi dans
la pauvreté la plus grande partie de la population.
Le Roi-Soleil s’attaquera frontalement aux réveils
religieux en cours, en cherchant à éteindre le courant protestant en France. Au
plan local et par des arrêts du Conseil, Louis XIV restreignit petit à petit
les libertés accordées aux protestants par l'application rigide de l'édit de
Nantes, jusqu’à vider le texte de sa substance. La logique fut rapidement que
ce qui n'était pas autorisé par l'édit était interdit. Cela conduisit à
l'interdiction de tout prosélytisme et de certains métiers pour les membres de
la RPR. Avec l'arrivée au pouvoir de Louvois, la pression sur les protestants
s'aggrava par le moyen des logements de troupes. Les protestants les plus
pauvres furent soumis à partir de 1679 aux dragonnades. La radicalisation de
cette politique accéléra des conversions contraintes. L'édit de Nantes fut
révoqué par Louis XIV
et le protestantisme est dès lors interdit sur le territoire français. La
France c’est définitivement coupée de la lumière du Christ et va le payer très
cher dans les siècles qui vont suivre.
Le 17ème et 18ème siècle, seront
marqués par des règnes relativement longs, mais également marqués par des
guerres et des fins de règnes pénibles. Louis XV remettra au gouvernement un cardinal,
où Fleury dirigera le pays pendant 17 ans,
puis dirigera seul comme le fit Louis XIV. Avec le traité
d'Aix-la-Chapelle en 1748, le roi rendit toutes ses conquêtes à l'Autriche, à
l'indignation du peuple, la consternation de ses généraux et à la surprise des
puissances européennes. Louis XV, qui n'avait pas le tempérament belliqueux de
son prédécesseur et qui avait compris que jamais l'Angleterre ne laisserait les
ports belges devenir français et que le temps était venu de contrecarrer les
nouvelles puissances émergentes protestantes (Angleterre, Prusse) pour sauvegarder
l'ordre ancien représenté par la France et l'Autriche catholiques, se
satisfaisait d'un royaume hexagonal, qu'il appelait son pré carré. Les
rois français avaient pris conscience que préserver le catholicisme c’était
préserver l’absolutisme.
Mais comme avec son grand-père avant lui, le roi va finir
dans la déchéance, la maladie et la haine du peuple va grandir contre lui. Outre
le fait que roi s’était soumis à l’empire d’Autriche, ses multiples maîtresses le
rendirent encore plus impopulaire. Une rupture toujours plus profonde
s’installe avec les pays protestants. À la fin du mois d'août 1756, Frédéric II
envahit la Saxe sans déclaration de guerre et vainquit facilement les armées
saxonnes et autrichiennes, mal préparées. Louis XV se trouva contraint d'entrer
en guerre. Entre-temps, la Grande-Bretagne avait déjà déclaré la guerre à la
France le 18 mai 1756. Ce sera la guerre de Sept Ans (1756-1763), qui
aura des conséquences importantes en Grande-Bretagne et en France.
Frédéric II de Prusse, troisième roi de Prusse (1740-1786).
Il fait entrer son pays dans la cour des grandes puissances européennes. Après
avoir un temps fréquenté Voltaire, il devient célèbre pour être l'un des
porteurs de l'idéal du prince du siècle des Lumières en tant que « despote
éclairé ». Désormais allié à l’Angleterre, il contribuera au déclin
continental de la monarchie en France. Sur les mers et dans les colonies ce sera
encore bien pire. La guerre de Sept Ans est le conflit majeur du XVIIIe siècle, souvent comparé à la Première
Guerre mondiale par le fait qu’elle s’est déroulée sur de nombreux théâtres
d’opérations (Europe, Amérique du Nord, Inde…) et s'est traduit par un
rééquilibrage important des puissances européennes. De là est né l’Empire
britannique, puissance hégémonique tout au long du XIXe siècle,
dont l'affirmation fait presque entièrement disparaître le Premier espace
colonial français, l'espace dominateur mondial durant le XVIIe
et la première partie du XVIIIe siècle.
D’un point de vue diplomatique, la Grande-Bretagne
s’impose comme la grande puissance mondiale dominante du siècle des Lumières.
Du côté des perdants, la France sort du conflit extrêmement affaiblie. Economiquement,
le bilan est catastrophique pour tous les pays, principalement pour la France, mais
la Grande Bretagne pourra s’appuyer sur ses nouvelles colonies pour rétablir
ses finances. La France contrainte de modifier sa politique, de nouvelles
levées d'impôts vont être décidées par le gouvernement afin de régler au plus
vite l'endettement et de rebâtir une marine en perdition ; des mesures
très mal perçues par la population au point d'en faire probablement l'une des
causes des futurs troubles qui mèneront à la Révolution française.
Comme son grand-père Louis XIV, Louis XV verra mourir la
plus part des membres de sa famille. En 1752, le roi avait déjà perdu sa fille
préférée Henriette. En 1759, mourut son aînée, la duchesse de Parme. En 1761,
la mort du duc de Bourgogne, âgé de dix ans, fils aîné du dauphin, enfant
précoce et prometteur, fut vivement ressentie. En 1763 mourut à Schönbrunn
l'intelligente et romanesque petite-fille du roi, épouse de l'archiduc héritier
d'Autriche, Marie-Isabelle de Bourbon-Parme. En avril 1764 mourut sa maîtresse
la Marquise de Pompadour. En 1765, le roi perdit successivement son fils,
dauphin, dont la vie morale irréprochable l'édifiait et son gendre le duc de
Parme. Enfin, en juin 1768, mourut la reine. La malédiction sur la famille
royale s’achèvera avec le roi lui-même. Le 26 avril 1774, se
déclarèrent les symptômes de la petite vérole, alors que Louis XV était au Petit
Trianon. Le roi mourra le 10 mai 1774, au château de Versailles, des
suites de la maladie (septicémie aggravée de complications pulmonaires), ceci
dans l'indifférence du peuple et la réjouissance d'une partie de la cour.
Variolique, il ne fut pas embaumé : il est le seul roi de France à ne pas
avoir reçu cet hommage post-mortem. Il laissa le trône à son petit-fils, le
futur Louis XVI qui finira guillotiné place de la Révolution à Paris le 21 janvier 1793.
Le 16 octobre 1793, durant la profanation des tombes de la basilique
Saint-Denis, après avoir ouvert les cercueils de Louis XIII et de Louis XIV
(relativement bien conservés) les révolutionnaires ouvrirent celui de Louis XV
et découvrirent le cadavre nageant dans une eau abondante (perte d'eau du corps
qui avait été en fait enduit de sel marin, le roi dévoré par la petite vérole
pendant presque 20 années n'ayant pas été embaumé comme ses prédécesseurs).
Tombant rapidement en putréfaction, car désormais à l'air libre, les
révolutionnaires brûlèrent de la poudre pour purifier l'air qui dégageait une
odeur infecte puis jetèrent le corps du roi, à l'instar des autres, dans une fosse
commune sur de la chaux vive.
Le siècle des Lumières sera donc le siècle du basculement
des monarchies catholiques qui s’effondreront, face aux nations qui se soumettront
à la lumière du Christ. Les nations qui progresseront le plus, seront celles
qui resteront dans le courant porteur des réformes religieuses, comme en
Amérique où les États-Unis d'Amérique furent proclamés indépendants (4 juillet 1776)
et qui poursuivront l’élan des Lumières jusqu’au troisième réveil chrétien qui
suivit celui des méthodistes, le réveil de Pentecôte, qui fera des Etats-Unis
la plus grande nation du 20ème siècle. On notera que l’Angleterre, malgré
sa toute-puissance, ne pourra pas s’opposer à la volonté des colons. Ce qui est
une démonstration de plus de la supériorité de l’Esprit sur la volonté des
politiques. Dieu favorisant toujours ceux qui lui sont les plus fidèles.
Le tableau de fond étant posé, on peut revenir à la
fondation du maçonnisme français et continental au 18ème siècle. Aujourd’hui
les francs-maçons affirment que grâce
aux loges qui apparaissent à Paris à partir de 1725 ou à Bordeaux en 1732, le
modèle parlementaire britannique, un certain libéralisme politique, la
tolérance religieuse et le rationalisme scientifique se diffusent dans toute
l'Europe. Les initiés de renom, rejoints par Voltaire, Mozart, Goethe, La
Fayette, Franklin, et tant d'autres, propagent les idées des Lumières qui
inspireront notamment les révolutions, américaine de 1776 et française de 1789.
De telles affirmations sont un mythe, une légende à la gloire du maçonnisme et
un mensonge grossier. Le libéralisme politique sous la dictature napoléonienne
n’existera jamais et encore moins la tolérance religieuse quand les maçons sont
au pouvoir. Quant à l’esprit des Lumières, ils ne le diffusent pas, car déjà
largement répandu sur tout le continent grâce aux humanistes qui en posèrent
les fondements, mais au contraire ils vont le pervertir tel un cancer qui
partira d’Angleterre pour diffuser ses métastases occultes à travers tout le
continent.
La maçonnerie qui à l’origine agit comme un contrecourant
religieux occulte face aux réveils religieux dus au Saint Esprit, ne se
développe pas aussi fortement dans les sphères d’influence en France ou le roi
et l’Eglise s’oppose à son action, mais surtout où les réveils religieux du
nord de l’Europe ont été éteins. Par conséquent, aucune contreréforme occulte
n’était vraiment nécessaire pour Satan qui se limitera à quelques loges
d’illuminés qui rêvèrent un temps de maçonnisme templier, un pur mythe. Les
francs-maçons français du XVIIIe siècle, à commencer par le très influent
André-Michel de Ramsay, ont d'ailleurs pris un malin plaisir à récupérer,
notamment dans les hauts grades, la foisonnante mythologie templière et
chevaleresque du Moyen Âge, au point de propager certaines légendes: selon eux,
les francs-maçons seraient les descendants secrets des anciens membres de
l'ordre du Temple du temps des Croisades, aboli par le pape Clément V et
Philippe le Bel en 1312. Il s'agit d'une pure invention, mais elle continue
d'alimenter les fantasmes.
De surcroît, le clergé catholique qui ne souffre aucune
remise en cause de son autorité, va rapidement entrer en guerre contre les
francs-maçons. En 1738, la France ne compte pas plus de 300 ou 400 frères,
initiés depuis moins de dix ans, lorsque le Vatican publie, sous la plume du
pape Clément XII, la bulle "In eminenti". In eminenti apostolatus
specula est une bulle pontificale émise le 28 avril 1738 par Clément
XII (1730-1740) contre la Franc-maçonnerie. Quoique prononcée comme définitive
(« constitution valable à perpétuité »), cette condamnation ne fut
que la première d'une longue série, puisque pendant plus de deux siècles,
pratiquement tous les successeurs de Clément XII l'ont reformulée. En France, la
bulle de 1738 ne sera jamais
enregistrée, pas plus que celle de 1751, signée par Benoît XIV. Les
francs-maçons ne représentant pas une menace pour la monarchie, le roi n’usera
pas de son autorité sur des sujets aussi mineurs. Cependant, cette déclaration
de guerre au maçonnisme va conduire après la Révolution à transformer la France
fille ainée de l’Eglise, en France fille ainée du maçonnisme quand les
francs-maçons accèderont au pouvoir.
Pour en revenir au rôle des francs-maçons dans la
Révolution française, quelques points d’histoires doivent être mis en lumière. La
philosophie des Lumières a joué un rôle déterminant dans la tournure que
prirent les évènements, mais son influence est à nuancer : accorder trop
d'importance aux préceptes nés durant ce siècle se révélerait être un manque de
fidélité historiographique majeur. Contre la monarchie absolue à la française,
le modèle anglais d'une monarchie limitée par un parlement (assemblée élue) est
mis en avant. À l’obéissance du sujet s’opposent les droits du citoyen. Rousseau
défend l'idée que le pouvoir souverain suprême réside dans la Nation et
s'oppose à Voltaire, partisan du despotisme éclairé et donc favorable à l'absolutisme,
mais qui en mettant la Raison au centre de tout, s'oppose aux fondements
religieux de la monarchie française.
Au sujet de Voltaire un autre mythe maçonnique mérite
d’être mis en pièce. Symbole des lumières, chef de file du parti philosophique,
son nom reste attaché à son combat contre « l’Infâme », nom qu’il
donne au fanatisme religieux et à son combat pour le progrès et la tolérance.
Il est déiste et son idéal reste celui d’une monarchie modérée et libérale,
éclairée par les « philosophes ». Il agit auprès des élites éclairées
de l’Europe des Lumières, en se servant de son immense notoriété et prend seul
la défense des victimes de l’intolérance religieuse et de l’arbitraire dans les
affaires qui l’ont rendu célèbre (Calas, Sirven, Chevalier de la Barre, Comte
de Lally Tollendal). A la fin de sa vie en 1778, Voltaire est au sommet de sa
gloire. La loge du Grand Orient de France : « Les Neuf
Sœurs », ayant appris, à sa grande surprise, que Voltaire n’était pas franc-maçon,
le contacte pour frapper un grand coup en faveur de son propre prestige. Elle
l’initie et cette initiation a un grand retentissement qui devient pour
certains le symbole de l’union des Lumières et de la Franc-Maçonnerie. Cette initiation
précèdera sa mort de quelques jours. Il portera le tablier du philosophe
Helvétius. Voltaire n'a été maçon que 54 jours, les derniers 54 jours de
l'existence d'un vieillard malade. Il ne s’agit en fait que d’une tentative de
récupération à l’image générale d’une maçonnerie qui serait à l’initiative des
Lumières, ce qui est totalement faux, comme le cas de Voltaire le démontre.
En fait de philosophie ou d’un hypothétique complot
maçonnique qui n’a jamais existé, la Révolution française sera le résultat de
faits beaucoup plus terre-à-terre, c’est le cas de la dire. La noblesse,
évincée du pouvoir sous Louis XIV, ne rêve que de revenir
aux affaires. À cette revendication politique, s'ajoute une
revendication économique. Les nobles n'ont pas le droit d'exercer un grand
nombre d'activités économiques sous peine de « déroger »,
c'est-à-dire de perdre leurs privilèges. Dans un siècle où la rente de la terre
stagne et où les frais de représentation (costumes, carrosses…) sont de plus en
plus élevés, leur pouvoir d'achat diminue. La noblesse s'arc-boute sur ses
anciens privilèges, principalement les droits seigneuriaux, et exige le
paiement de certaines redevances tombées en désuétude. Elle s'arroge aussi
l'exploitation exclusive de certains communaux, ces terres non cultivées où,
traditionnellement, les paysans pauvres pouvaient faire paître leurs quelques
bêtes. Cette crispation est très mal vécue par les paysans qui réclament
l'abolition des droits seigneuriaux pour soulager leur misère. La mauvaise récolte
de 1788, due à un épisode d'échaudage des grains, provoquant une hausse des
prix du grain ne fera rien pour arranger la misère des paysans et est
aujourd'hui présentée par divers historiens comme une des causes de l'agitation
populaire et de la Révolution, le politique étant considéré comme responsable
du manque de grains. À preuve, notamment, on peut citer ces femmes qui iront à
Versailles demander que sortent « Le Boulanger, la Boulangère, et le petit
mitron ». Des révoltes de subsistances en 1788 attestent elles aussi d'une
crise frumentaire à l'origine partielle de la Révolution.
Une légende impute alors aux francs-maçons une lourde
responsabilité dans la Révolution et la Terreur, mais elle est surtout le fait
de catholiques qui ont vu l’influence de l’Eglise s’effondrer et le clergé être
littéralement dépouillé de presque tous ses biens. Mais ceci n’était pas le
résultat d’un complot, mais d’une population excédée par des siècles de
despotisme papal, qui jusqu’au bout soutiendra toujours les rois contre le
peuple. Il faut dire que
les prises de position vaticane ne font qu’aggraver les choses. Le pape Pie
VI condamne les principes de la Révolution française en mars
1791, refusant la possibilité d'une liberté considérée indépendamment du Dieu
créateur. Les droits de l'Homme sont également condamnés, mais en tant qu'ils accordent à l'homme
des droits indépendamment de Dieu. Le pape demande la rétractation
de tous ceux qui ont juré : c'est le schisme avec l’Etat et la fin consommé de
l’Eglise sur le pouvoir français.
Le clergé alors, plutôt que de faire son mea culpa,
cherchera à discréditer la Révolution en l’attribuant non au peuple de France,
mais à une élite occulte. Assez rapidement des ouvrages essaieront de faire passer ce message et dès 1792 sous la
plume de l’abbé Lefranc (Le
voile levé pour les curieux),
popularisée en 1797 dans les milieux de la contre-révolution par l’abbé Barruel
(Mémoires pour servir à
l’histoire du jacobinisme),
poursuivi au XX° siècle par Augustin Cochin (La
révolution et la libre-pensée) elle met en évidence le prétendu
grand nombre de révolutionnaires maçons. Mais si la Révolution a permis à
certains maçons célèbres de parvenir au pouvoir à la suite du changement de
régime, c’est que la franc-maçonnerie par sa pratique du secret permettait à
une certaine élite intellectuelle de se retrouver et de discourir sur des
sujets qui auraient été considérés comme de la trahison et de l’hérésie par le
roi et l’Eglise catholique. On peut donc dire que le despotisme royal et papal a
favorisé le développement du maçonnisme qui dans le cas français s’inscrivait
plus dans le cadre d’un contrecourant monarchique et clérical, qu’un
contrecourant de la Réforme protestante.
Bonjour,
RépondreSupprimerVos dernières études sont très intéressantes surtout dans leur mise en relief historique.
Néanmoins, un point m'interpelle : quel est votre position quant aux "humanistes" ?
D'ailleurs, quelle est la définition d'un humaniste et un chrétien peut-il est considéré comme tel ?
Enfin, un détail m'a frappé les yeux lors de ma conversion, avec vous remarqué l'oeil dans la pyramide dans la déclaration universelle des droits de l'homme ?
Fraternellement
J’y viens, doucement en étudiant en profondeur l’Histoire sur ces sujets-là. Comme d’habitude le Seigneur m’a progressivement conduit à étudier un sujet qui me répugne de prime abord, la franc-maçonnerie, mais qui s’avère nécessaire si on veut connaitre le fonctionnement de l’adversaire et de la société en général. Maintenant que j’ai commencé j’irai aussi loin que le Seigneur me permettra d’aller, comme avec l’étude sur les cathédrales.
RépondreSupprimerBref un éclairage nouveau sur le catholicisme et la franc-maçonnerie naitra d’un point de vue chrétien. Quand tout sera compilé et édité en ligne, on aura un outil nouveau de compréhension au sein de l’Epouse. Ce qui ne sera pas de trop pour comprendre les évènements en cours et à venir. Dommage que cela ne soit pas un littéraire pur qui fasse cela, mais si quelqu’un reprend la base pour lui donner un contenu moins brut, je suis preneur à condition que cela reste gratuit et ouvert à tous sans condition.